Grands Colloques - L'européanisation du droit - 62

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L'EUROPÉANISATION DU DROIT PÉNAL

professeur de mathématiques. La condition de la double incrimination était
au cœur de la qualification juridique des faits dans la mesure où la majorité
sexuelle est fixée à quinze ans en France et à seize ans en Grande-Bretagne
alors que la jeune fille séduite par son professeur de mathématiques avait
précisément quinze ans et demi. Mais la question centrale de l'affaire
Jeremy concernait l'absence de recours contre l'autorisation d'extension
des effets du MAE. En effet, l'article 695-46 CPP prévoyait qu'après la
remise d'une personne à un autre État membre de l'UE en application d'un
MAE, la chambre de l'instruction statue dans un délai de trente jours, « sans
recours », sur une demande aux fins soit d'étendre les effets de ce mandat
à d'autres infractions, soit d'autoriser la remise de la personne à un État
tiers. Le requérant soutenait que l'absence de recours contre la décision
de la chambre de l'instruction porte notamment atteinte au droit à un
recours juridictionnel effectif. Tirant les conséquences de l'arrêt Jérémy F.
de la CJUE du 30 mai 2013 et de la décision du Conseil Constitutionnel
relative à la question préjudicielle de constitutionnalité du 14 juin 2013
qui a déclaré que les mots « sans recours » de l'article 695-46 alinéa 4 CPP
étaient contraires à la Constitution, la loi complète l'article 695-46 CPP
en précisant que la décision statuant sur une demande de remise complémentaire « peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation, par le procureur
général ou par la personne recherchée, dans les conditions énoncées aux
articles 568-1 et 574-2 »47.
Un autre arrêt de la CJUE sur le MAE a été à l'origine d'une réforme de la
procédure pénale. La DC autorise le refus de la remise en vue de l'exécution
d'une peine si la personne a la nationalité de l'État d'exécution ou bien y
réside et que celui-ci s'engage à exécuter cette peine. La transposition en
France de cette disposition a été sanctionnée par la CJUE dans l'arrêt Lopes
Da Silva Jorge du 5 septembre 2012 car le CPP ne visait que la personne
ayant la nationalité française48. Dans son arrêt en grande chambre de 2012,
la CJUE a jugé que l'article 695-24, 2° CPP était contraire au principe
de non-discrimination fondée sur la nationalité garanti par l'article 18
TFUE, en ce qu'il réserve aux seuls ressortissants français le bénéfice de
la non-exécution d'un MAE en vue de procéder à l'exécution sur le territoire français d'une peine d'emprisonnement prononcée dans un autre État
membre. L'article 695-24 2° CPP a donc dû être modifié sur ce point afin
d'étendre la possibilité de refuser l'exécution d'un MAE concernant l'exécution d'une peine aux étrangers, qu'ils soient citoyens de l'UE ou non, qui
47. Loi n° 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le
domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements
internationaux de la France, JORF n° 0181 du 6 août 2013, p. 13338.
48. Aff. C-42/11.
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