Grands Colloques - L'européanisation du droit - 79

JEAN SIRINELLI

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ou à l'articulation de deux engagements internationaux entre eux15. En
sens inverse, le juge a pu cantonner une solution relative à une source du
droit de l'Union à ce seul cadre. Par exemple, le Conseil d'État reconnaît
aux principes généraux du droit de l'Union européenne un statut normatif
distinct de celui traditionnellement réservé aux principes généraux du droit
international. À l'inverse de ces derniers16, ils ont en effet acquis, par la
jurisprudence administrative et conformément aux exigences de l'ordre
juridique de l'Union, une valeur supra législative17.
D'autre part, de façon positive, il est possible de constater le renforcement de la spécificité constitutionnelle du droit de l'Union. Le contrôle
du respect des sources européennes par l'Administration et la loi ne découle
plus de la simple application mécanique de l'article 55 de la Constitution. Il
se double d'un recours à une base constitutionnelle originale, l'article 88-1,
qui permet de fonder juridiquement la mise en œuvre spécifique du contrôle
du droit de l'Union. Au moyen d'une interprétation volontariste de cette
disposition, les juges constitutionnel et administratif font ainsi découler de
cet article une exigence constitutionnelle de transposition en droit interne
des directives européennes ; celle-ci affecte, en retour, le contrôle des textes
nationaux de transposition. La particularité de ce contrôle est un exemple,
parmi d'autres, de la spécialisation des solutions auxquelles parvient le juge
administratif.

2. La singularisation des solutions
La particularité des solutions relatives au droit de l'Union s'illustre
principalement à travers le contrôle adapté des textes nationaux de transposition des directives européennes. Elle ne se limite cependant pas à ce
cas de figure précis et tend à irriguer l'ensemble du droit administratif.
En premier lieu, concernant le contrôle de la compatibilité des textes
nationaux aux directives qu'ils transposent, la spécificité des solutions est
double. D'une part, le juge administratif est concurrencé dans l'exercice
de son contrôle de conventionnalité des lois de transposition, qu'il exerce
par voie d'exception. En effet, le Conseil constitutionnel accepte, dans le
cadre de son contrôle a priori, d'examiner le grief tiré de la méconnaissance manifeste de la loi à la directive qu'elle transpose dans le cadre du
contrôle de l'article 88-1 de la Constitution18. Cette concurrence s'efface
cependant après la promulgation de la loi, le Conseil constitutionnel ne
pouvant être saisi d'un tel argument - non assimilable à un droit ou une
15. CE, Ass., 23 décembre 2011, Kandyrine de Brito Paiva, n° 303678.
16. CE, 28 juillet 2000, Paulin, n° 178834.
17. CE, 3 décembre 2001, Syndicat national de l'industrie pharmaceutique, n° 226514.
18. CC, 30 novembre 2006, Loi relative au secteur de l'énergie, n° 2006-543 DC.
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