Grands Colloques - L'université et ses responsabilités - 156

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L'UNIVERSITÉ ET SES RESPONSABILITÉS

Cependant, si les règles d'hygiène et de sécurité édictées par la présidence
sont parfaitement précises et applicables mais que l'enseignant ou l'agent
ayant la charge de les appliquer ne le fait pas, alors il est fort à parier qu'il
sera le seul à se voir poursuivi devant la justice pénale. Ce sera le cas de
l'enseignant qui méconnaît les règles d'utilisation de produit dangereux ou
de port de protection individuelle avec ses étudiants. Ce sera aussi le cas
pour l'enseignant qui organise un pot alcoolisé dans l'enceinte de l'université et laisse un de ses étudiants ivre reprendre sa voiture avant que ce
dernier ne se tue dans un accident de la route60.
En cas de faute commise exclusivement par quelqu'un d'autre, le
président pourra ainsi échapper aux poursuites. Mais peut-il tout de même
anticiper et ne pas confier son destin pénal au hasard des événements ?
Sur ce point, les employeurs privés sont exonérés de leur responsabilité
pénale en cas de délégation de pouvoirs envers un salarié61. Qu'en est-il
à l'université ?
De prime abord, il serait possible de considérer que puisque l'article L.
712-2 pose la responsabilité du président en matière d'hygiène et de sécurité
et ne prévoit qu'une délégation de signature, il ne peut pas se dégager de
sa responsabilité. Cependant une telle lecture serait peut-être trop hâtive.
En effet, d'une part, aux termes de l'article R. 712-4 du Code de l'éducation, la délégation de pouvoir est possible en matière de maintien de
l'ordre. En cas de faute commise en ce domaine par le délégataire, seul ce
dernier engage sa responsabilité.
D'autre part, même si les raisonnements par analogie sont en principe
prohibés en matière pénale en raison d'un principe d'interprétation stricte
de la loi pénale posé par l'article 111-4 du Code pénal62, il est possible de
rapprocher la situation du président de l'université de celle du maire. Lui
aussi est responsable de la sécurité sur sa commune, et pour lui aussi le
Code général des collectivités territoriales ne prévoit qu'une délégation de
signature. Or, malgré le silence de la loi, la jurisprudence semble favorable
aux délégations de pouvoirs.
Dans un rapport relatif à « La responsabilité pénale des agents publics en
cas d'infractions non intentionnelles », le Conseil d'État a ainsi considéré, je
cite, « qu'il ne semble pas y avoir d'obstacle de principe à une transposition
60. A déjà été condamné pour homicide involontaire l'enseignant qui, en violation d'un
règlement intérieur, a organisé dans un centre de formation un repas alcoolisé, et a laissé
repartir avec son véhicule un apprenti qui s'est ensuite tué dans un accident de la route
Cass. crim., 12 janv. 2010, Bull. crim., n° 5. Le même agissement à l'université entraînerait
la même condamnation.
61. Cass. crim., 24 janv. 1902, Bull. crim., n° 37 ; Cass. crim., 28 juin 1902, Bull. crim.,
n° 237 ; Cass. crim., 22 mai 1973, Bull. crim., n° 230.
62. Cf. E. Dreyer, Droit pénal général, op. cit., n° 534, p. 340.
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