Contextes - Le formalisme - 198

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L'ENTREPRISE

(protection, sécurité juridique...). Dans le silence de la loi, la forme est
abandonnée à l'imagination des parties. Par exemple, rien n'impose de
conclure un bail commercial par écrit, si ce ne sont des considérations de
sécurité juridique. L'article 1714 du Code civil indique ainsi qu'on peut
« louer ou par écrit ou verbalement ». Le mandat également « peut être
donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre.
Il peut aussi être donné verbalement (...) » (C. civ., art. 1985). De même
encore, un contrat peut parfaitement être constaté par acte sous signature
privée dans un premier temps et que soit prévue, dans un second temps, une
réitération par acte authentique ; une promesse de cession de titres sociaux
peut prévoir des formes spécifiques de levée de l'option (option levée par
lettre recommandée par exemple). Que l'on songe enfin au code secret
dans les conventions de carte de crédit, code secret qui vient remplacer la
signature du titulaire et qui fait la preuve de l'ordre de paiement.
Cette liberté des parties, en l'absence de dispositions légales impératives
sur la forme, n'est toutefois pas absolue. Même dans le champ laissé vacant
par la loi, l'imagination des parties est nécessairement inféodée au pouvoir
d'interprétation du juge quant à la valeur des formes choisies ou quant à
leur force probante. D'une part, en effet, il apparaît que la jurisprudence est
relativement exigeante à l'endroit de ce formalisme volontaire10, notamment
par méfiance à l'encontre d'un formalisme qui faciliterait en réalité l'évasion
des liens contractuels. D'autre part, cette liberté ne doit pas aboutir à se
créer de titre à soi-même. Si la jurisprudence, en droit des affaires, a paru
peu encline à censurer ce type de montage11, l'ordonnance n° 2016-131
du 10 février 2016 est venue le condamner et lui fournir une base légale
(C. civ., art. 1363). Enfin, il ne faut pas négliger que les conventions sur
la forme - particulièrement celles sur la preuve - peuvent constituer par
certains égards des clauses abusives12. Dans les conventions de compte de
dépôt13 ou dans les contrats de cartes de paiement, assortis ou non d'un
crédit14, ce type de montage est clairement sous surveillance.
10. Par exemple, en matière bancaire : CA Paris, 11 sept. 2014, Jurisdata n° 2014-021978.
11. Cass. 1re civ., 8 nov. 1989 (2 arrêts), n° 86-16.196 et n° 86-16.197, Bull. civ. I, n° 342
et 343, D. 1990, p. 369, note Gavalda C. ; JCP G 1990, 21576, note Virassamy G. ; RTD
civ. 1990, p. 79, obs. Cabrillac M. et Teyssié B. Dans ces décisions, la Cour a admis la
validité d'une convention sur le procédé de preuve (preuve du versement d'une somme
d'argent au moyen d'une carte magnétique) car les parties avaient la libre disposition de
leurs droits. Mais elle a négligé le fait que ce document émanait d'un appareil dont le prêteur
lui-seul avait la maîtrise.
12. V. not. : Lecourt A., « Compte de dépôt et clauses abusives », RD bancaire et fin. 2016
[La banque et le droit des clauses abusives], p .84 ; Recommandation de la Commission des
clauses abusives, n° 91-02, 23 mars 1990, BOCC 6 sept. 1991.
13. V. Lecourt A., « Compte de dépôt et clauses abusives », loc. cit.
14. Recommandation de la Commission des clauses abusives, n° 94-02, 17 déc. 1991, BOCC
27 sept. 1994.
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