Bibliothèque de droit social - Les juges de l'activité professionnelle sportive - Tome 68 - 487

LA PRISE EN COMPTE PAR LES JUGES DES ÉTATS DE LA SPÉCIFICITÉ SPORTIVE 465 ket-ball qui distinguait deux catégories de joueurs, pour la participation aux compétitions, dans le but de limiter le phénomène de naturalisation « frauduleuse ». En effet, la fédération exigeait la présence, dans les équipes de première division, d'au moins huit joueurs de nationalité française (licenciés au cours des cinq dernières années) et pas plus de deux joueurs étrangers ou joueurs assimilés : certains Français entrant dans cette deuxième catégorie, ceux ayant récemment acquis la nationalité française ou ceux ayant séjourné à l'étranger ou encore ceux s'étant tardivement dirigé vers la pratique du basket462. Pourtant fondées sur « la nécessité d'assurer le perfectionnement des joueurs formés en France »463, il a été jugé que ces dispositions excédaient, par leur importance, ce qui aurait pu être justifié par les buts poursuivis464, le Conseil d'État se plaçant ainsi sur le terrain de la proportionnalité465. Ensuite, en 1989466, une approche sensiblement différente a guidé la Haute juridiction, réunie en assemblée, toujours à propos d'une disposition du règlement de la Fédération française de basket-ball. Limitant à deux le nombre de joueurs non sélectionnables en équipe de France pouvant participer aux rencontres du championnat de France (c'est-à-dire à deux joueurs de nationalité étrangère ou n'ayant acquis la nationalité française que depuis trois ans), les règles sportives ont été déclarées illégales en ce qu'elles contrevenaient aux dispositions du code de la nationalité « qui interdisent à la fédération d'établir des distinctions entre les joueurs français selon qu'ils ont ou non acquis la nationalité française et selon la date à laquelle ils l'ont acquise, et d'assimiler ceux d'entre eux qui la possèdent depuis moins de trois ans à des joueurs étrangers »467. Traduisant « une conception très exigeante du principe d'égalité »468, la décision rejette, au demeurant, la circonstance que les dispositions contestées utilisaient un critère retenu par la fédération internationale et qu'elles avaient pour but de permettre l'entraînement dans les compétitions nationales de joueurs remplissant les conditions pour faire partie de l'équipe de France dans les compétitions internationales469. De sorte qu'« aucune 462. V., pour des explications sur le contexte et les origines de cette affaire, P. Collomb, op. cit. 463. Le commissaire du gouvernement, Bruno Genevois, a estimé que « le seul objet de ces nouvelles règles est de limiter considérablement l'accès à certaines compétitions des joueurs qui ont acquis postérieurement à leur naissance la nationalité française, sans reposer sur des impératifs d'ordre sportif incontestables ». 464. C'est l'application des principes de pertinence et de proportionnalité qui est ici réalisée : « Dans l'exercice de leur pouvoir, les fédérations sportives ne peuvent légalement porter atteinte au principe du libre accès aux activités sportives pour tous et à tous les niveaux, qui résulte de l'article 1er de la loi, et au principe d'égalité, que dans la mesure où ces atteintes ne sont pas excessives au regard des objectifs poursuivis ». 465. Ce qui a conduit certains à soutenir que l'arrêt « Bosman » du juge communautaire est dans une logique proche de l'arrêt « Broadie » du juge administratif. 466. CE, 23 juin 1989, n° 101894, Bunoz : AJDA, 1989, p. 627, concl. J.-P. Faugère ; D., somm., 1990, p. 277 et Rev. jur. éco. sport, n° 10, 1989-3, p. 68, obs. J.-C. Bonichot ; Gaz. Pal., 1989, 2e sem., p. 878, note R. Houver. 467. V., égal., CE, 20 janv. 1988, n° 55587, Hass. La Haute assemblée avait annulé la règle de la Fédération française des sports de glace et la décision individuelle qui en faisait application (prévoyant une limitation de l'activité compétitive des joueurs naturalisés) au motif qu'elles établissaient une discrimination contraire à l'article 81 du code de la nationalité. 468. J.-C. Bonichot, op. cit., p. 277. D'ailleurs, le commissaire du gouvernement admettait le caractère non excessif de telles règles en ces termes : « si vous deviez exercer le contrôle de proportionnalité (...), nous vous proposerions de conclure à la légalité par référence à la logique sportive, celle-là même qui a directement inspiré la fédération », J.-P. Faugère, op. cit., p. 628. 469. Dans un arrêt de la même année, était concernée une disposition du règlement de la Ligue nationale de football qui limitait à deux le nombre de joueurs étrangers non ressortissants de la CEE que peut utiliser un club professionnel. Cette disposition a servi de support au refus des organes

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