Hors collection - La gouvernance financière des villes au Maroc et en France - 60

RAPPORT INTRODUCTIF

La figure 6 présente les données réelles de l'évolution des taux de ruraux
et d'urbains de 1912 à 2030 ainsi que leur modélisation. Il est arithmétiquement normal que les deux courbes soient inverses l'une de l'autre et
que les valeurs de certains estimateurs des paramètres des modèles ajustés
soient très proches. On aura également remarqué que les deux courbes se
coupent au point d'ordonnées 50 % vers 1992.
À première vue, la population rurale tend vers un palier au-delà duquel
elle se stabilisera. Mais cette stabilité ne peut être que provisoire si, dans
l'avenir, le Maroc connaît des évolutions similaires aux autres pays. Car on
peut parier que cette population poursuivra sa baisse jusqu'à un point difficilement prévisible pour le moment puisqu'il dépend surtout des capacités
de certains secteurs de l'économie marocaine à se transformer, des changements climatiques dont les prévisions les moins pessimistes ne sont guère
réjouissantes, de la modernisation du secteur agricole, et d'autres facteurs
liés au marché du travail et du prix du foncier. Nous sommes certes loin
de « la fin des paysans », selon la célèbre expression de Mendras (1967),
que les États-Unis d'Amérique et l'Europe ont connue. Il est hautement
probable que nous assisterons à une stabilisation providentielle et sans
doute heureuse du fellah marocain.
La conclusion précédente relative à la population totale est corroborée
par l'analyse de l'évolution de la taille de la population urbaine et de celle
de la population rurale pour la période 1900-2030. Pour ne pas alourdir
l'exposé, je ne reproduis pas les graphiques des évolutions de ces deux
types de population.
On constate que la taille des populations urbaine et rurale suit le même
modèle logistique que la population totale. Ainsi, selon les projections
fondées sur le modèle logistique, la population du Maroc passerait de
presque 34 millions d'habitants en 2014 à 38 millions en 2030. L'effectif
de la population rurale restant quasi stable autour de 13,5 millions, l'évolution démographique marocaine serait principalement urbaine, en raison
essentiellement de l'exode rural et de l'urbanisation de zones rurales. Et
c'est grâce à ces deux facteurs que l'on compense le déficit démographique
propre à l'urbain. Avec en effet un taux de fécondité des femmes urbaines
qui avoisine 1,7, nous sommes loin du taux d'autoreproduction naturelle de
la population urbaine. En 2030, les villes marocaines abriteraient 64 % des
habitants du pays au lieu de 60,3 % en 2014, d'où le risque d'une pauvreté
urbaine plus accentuée.
Ces chiffres correspondent aussi à un scénario pour lequel le taux de
fécondité est en continuelle baisse et une émigration en décroissance mais
tendrait vers un seuil.

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