Grands Colloques - L'accès au juge et l'intérêt à agir - 129

L'INTÉRÊT À AGIR DANS LE CoNTENTIEUX CoNTRACTUEL 121

l'intérêt à agir des tiers susceptibles d'intenter ce recours soit entendu sous
l'angle du droit lésé plutôt que sous l'angle de l'intérêt à agir traditionnel
du recours pour excès de pouvoir.
on vit en 2007 assez largement sur un schéma binaire : recours de pleine
juridiction - droit lésé, recours pour excès de pouvoir - intérêt à agir. Dans
ses conclusions sur Tropic Travaux en 2007, Didier Casas s'inscrivait dans
cette logique et proposait donc que ce nouveau recours soit ouvert à tous
les tiers justifiant de droits patrimoniaux lésés. Et comme de nombreux
tiers qui avaient accès à l'acte détachable du contrat ne justifiaient pas de
droits patrimoniaux lésés, il proposait parallèlement de conserver la voie
du recours pour excès de pouvoir contre l'acte détachable pour ceux-ci.
Comme vous le savez, le Conseil d'État en 2007 avance prudemment
sur cette question des tiers qui ont intérêt à contester le contrat, puisqu'en
2007 on s'en tient aux concurrents évincés, avec une sorte de paradoxe. on
a en effet un recours de pleine juridiction, un recours réservé au concurrent
évincé qui est un tiers très particulier, parce qu'évidemment, le concurrent
évincé est certes un tiers au contrat, il n'est pas dans la sphère contractuelle, il n'est pas une des parties au contrat, mais son intérêt à contester
le contrat vient précisément du fait qu'il aurait bien voulu être dans la
sphère contractuelle, être l'un des cocontractants. Donc ce n'est pas un
tiers comme le préfet, l'élu local, l'association de protection de l'environnement, le contribuable, qui eux sont clairement en dehors de la sphère
contractuelle. Le paradoxe, en 2007, c'est que ce concurrent évincé, qui est
le seul tiers auquel on ouvre la voie du recours en contestation de validité du
contrat, est en même temps, et curieusement, une sorte de porte-parole de la
légalité puisque ce tiers-là est autorisé à invoquer tout moyen à l'encontre
du contrat, pas seulement les irrégularités qui affectent la procédure
de publicité et de mise en concurrence pour les contrats relevant de la
commande publique, mais tous les moyens, et cela sera d'ailleurs précisé
très clairement par un avis Gouelle du printemps 2012.
B. Pourquoi n'en est-on pas resté à Tropic Travaux » ? Pour plusieurs
raisons.
La première, c'est qu'il faut bien convenir du fait qu'en 2007, Tropic
Travaux n'est pas une contribution à une grande simplification du contentieux contractuel, puisqu'on ne supprime pas des voies de recours, mais on
en rajoute une autre. Pour les concurrents évincés, il n'y a pas juxtaposition.
Le concurrent évincé, une fois que le contrat est signé, dispose du recours
Tropic Travaux ; il ne dispose plus du recours contre l'acte détachable. En
revanche tous les autres tiers continuent à pouvoir utiliser ce recours contre
l'acte détachable qui est ouvert depuis l'arrêt Martin de 1905.
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