Grands Colloques - L'accès au juge et l'intérêt à agir - 130

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L'ÉVoLUTIoN DE L'INTÉRÊT À AGIR

Le nouvel élément de contexte, au cours des dernières années, c'est que ce
recours contre l'acte détachable, qui était qualifié de platonique, et qui l'était
d'ailleurs de 1905 au milieu des années 1990, en réalité ne l'est plus, ou en
tout cas, indirectement, ne l'est plus. Pourquoi ? Parce que le juge administratif se saisit de cette innovation que constitue le pouvoir d'injonction que
lui a donné le législateur par les lois successives de 1980 et 1995, et donc
la jurisprudence Époux Lopez, pour la première fois, établit un pont, une
articulation, entre le recours pour excès de pouvoir contre l'acte détachable
qui peut conduire à l'annulation de cet acte, et le sort in fine du contrat.
C'est une construction un peu compliquée puisqu'elle fait intervenir le cas
échéant trois juges successifs : le juge de l'annulation, le juge de l'exécution
et le juge du contrat. En effet le juge de l'excès de pouvoir ne peut faire
qu'une chose, c'est annuler l'acte détachable. Il faut que le juge administratif
soit ensuite ou parallèlement saisi de conclusions aux fins d'injonction, le
juge de l'injonction ne pouvant qu'enjoindre à l'administration de tirer
les conséquences de l'annulation de l'acte détachable, et l'une des conséquences de l'annulation de l'acte détachable peut être en certains cas qu'il
soit enjoint à l'administration de saisir le juge du contrat pour que celui-ci
se prononce sur sa légalité. Alors évidemment, quand on évoque le juge
de l'annulation, le juge de l'exécution et le juge du contrat, c'est en réalité
le même juge, avec des casquettes différentes mais dans une temporalité
qui n'est pas la même.
C. La conséquence importante des évolutions jurisprudentielles récentes,
c'est qu'à l'arrivée de ce parcours du combattant contentieux, le juge du
contrat, lorsqu'il est saisi, dispose des mêmes possibilités que le juge Tropic
Travaux lorsqu'il est saisi directement par un concurrent évincé, c'est-àdire qu'il peut rejeter, il peut inviter à régulariser et il peut résilier, voire
annuler rétroactivement le contrat. Donc la conséquence de tout cela, et
c'est un élément important dans le paysage au printemps 2014, c'est que l'on
a le recours Tropic Travaux, recours direct contre le contrat, qui normalement est purgé au-delà du délai de deux mois qui suit la publication du
contrat (ce qui signifie que le concurrent évincé, si le contrat a été publié, et
s'il n'a pas agi dans le délai de deux mois, ne peut plus rien faire, hormis le
cas échéant un recours indemnitaire), alors que, comme cela a été indiqué,
le tiers au contrat qui n'est pas un concurrent évincé peut attaquer l'acte
préalable dans un délai qui n'est pas souvent contraint, en l'absence de
publicité de cet acte. Et même lorsqu'il y a eu publicité, le tiers peut parfaitement décider, dans un premier temps de faire un recours contre l'acte
détachable, empocher l'annulation, puis quelques années plus tard, saisir le
juge de l'injonction et donc faire planer pendant toute la durée d'exécution
du contrat un risque juridique majeur, puisqu'il est toujours possible qu'à
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