Grands Colloques - L'accès au juge et l'intérêt à agir - 83

EXISTE-T-IL UN « INTÉRÊT À AGIR »

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on trouve cette préoccupation de l'effet utile de la QPC tant dans la
jurisprudence du Conseil d'État que dans celle de la Cour de cassation,
mais plus chez la seconde que chez le premier : les juridictions suprêmes
considèrent que la loi n'est pas applicable au litige ou à la procédure
lorsque l'inconstitutionnalité alléguée, à la supposer encourue, est « sans
incidence » sur la solution du litige ou sur la procédure engagée. Quelques
exemples tirés de décisions de non-renvoi permettent d'illustrer cette
affirmation.
S'agissant du Conseil d'État, le non-renvoi de la QPC est parfois justifié
par le fait que l'inconstitutionnalité de la loi contestée et l'abrogation qui
pourrait en résulter sont « sans incidence » sur la résolution du litige. C'est
ce qu'il affirme par exemple dans son arrêt du 19 janvier 2011, EARL
Schimttseppel61, dans lequel la haute juridiction administrative constate
que l'éventuelle inconstitutionnalité de la loi serait « sans incidence sur
l'appréciation de la légalité » de la décision attaquée62. De même, la contestation d'un article du Code minier relatif à la responsabilité pour dommages
consécutifs à l'exploitation minière est « sans incidence sur la légalité de
l'arrêté préfectoral donnant acte de la déclaration de travaux miniers »63.
Enfin, lorsque les dispositions législatives contestées ne constituent pas le
fondement des arrêtés litigieux, elles sont « sans incidence sur leur légalité »
et donc non applicables au litige64.
Du côté de la Cour de cassation, nombreux également sont les arrêts
dans lesquels la QPC n'est pas renvoyée faute pour celle-ci d'avoir, si elle
était accueillie, une « incidence » sur la solution du litige65. Un arrêt peut
notamment être cité : celui du 4 juin 2013 de la première Chambre civile,
aux termes duquel : « attendu que le juge de l'exécution ne pouvant ni
modifier le dispositif d'une décision de justice servant de fondement aux
poursuites, ni en suspendre l'exécution, il s'ensuit que l'inconstitutionnalité
alléguée, à la supposer encourue, serait sans incidence sur la procédure
engagée (...), la créance invoquée à l'appui de la mesure d'exécution forcée
résultant en effet d'une décision irrévocable, ayant autorité de la chose jugée
61. n° 343389.
62. Sur ce point, A. Lallet et X. Domino, Chronique de jurisprudence administrative
française, AJDA 2011, p. 375, spéc. p. 382.
63. CE, 2 oct. 2013, n° 369984. V. également CE, 20 sept. 2013, n° 369608 : la question de
savoir si le législateur aurait méconnu sa compétence au regard des droits et libertés invoqués
est sans incidence sur l'existence des fautes alléguées par le requérant ; par conséquent, les
dispositions législatives ne peuvent être regardées comme applicables au litige.
64. CE, 24 juin 2013, n° 360949. CE, 23 juill. 2012, n° 359934 : « les dispositions ne constituent pas (...) le fondement des arrêtés litigieux et sont sans incidence sur leur légalité ».
65. Cass. crim., 11 juill. 2012, n° 11-88430 : non-renvoi de la QPC dès lors qu'une « déclaration d'inconstitutionnalité, à la supposer encourue, serait sans incidence sur la solution du
pourvoi ». V. également, Cass. 2e civ., 23 janv. 2014 ou Cass. 2e civ., 7 juin 2012, n° 12-60235.
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