Grands Colloques - L'attractivité du droit français des sûretés réelles - 168

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EN DROIT INTERNE

2. Pourquoi, dès lors, prétendre « revivifier » en 2006 une sûreté qui, si
ancienne fût-elle, n'était nullement moribonde ? Il semble que les motifs
invoqués sont moins liés à des carences intrinsèques de l'institution qui,
au plan technique, continuaient à donner satisfaction qu'à des facteurs
externes, et plus précisément à l'existence de figures concurrentes qui lui
faisaient ombrage.
Qui sont ces concurrents ? D'où viennent-ils ? Essentiellement de trois
horizons.
Un concurrent français, d'abord : chacun songera à l'ascension prodigieuse du cautionnement dont l'importance n'a cessé de croître dans les
financements immobiliers qui sont traditionnellement la chasse gardée de
l'hypothèque3 ; d'où l'idée de revigorer cette sûreté afin de la réimplanter
dans ce qui fut autrefois son pré carré4.
Des concurrentes européennes, ensuite, en la figure de la cédule hypothécaire suisse et la dette foncière allemande dont on ne voudrait pas qu'elles
éclipsent l'hypothèque française dans l'harmonisation à venir des sûretés
immobilières en Europe ; d'où l'idée de moderniser l'hypothèque française
pour en faire un modèle d'inspiration crédible dans le grand chantier,
ouvert il y a bientôt trente ans, de l'euro-hypothèque5.
Des concurrents anglo-saxons, enfin : il a été observé que le crédit
hypothécaire est beaucoup plus dynamique outre-Atlantique et outreManche qu'il ne l'est en France, pour la bonne raison que l'hypothèque
y est utilisée pour financer des dépenses de consommation ; d'où l'idée,
relayée par deux rapports de l'inspection des finances rendus publics en
2004, d'importer des techniques voisines en droit français6.
3. Cette troisième inspiration a d'ailleurs fait que l'aspect le plus spectaculaire de la réforme de 2006 a surtout consisté, en matière immobilière,
dans l'introduction de ces nouveaux « produits » hypothécaires, d'inspiration anglo-saxonne, que sont le prêt viager hypothécaire et l'hypothèque
rechargeable7, « produits » qui, nous le verrons, n'ont pas connu le développement escompté. S'agissant au contraire du régime de l'hypothèque
3. Sur ce thème, v. M. Dagot, « Sûretés réelles contre sûretés personnelles », JCP N 1986,
I, p. 93 s.
4. M. Grimaldi, « Projet de réforme des sûretés », RDC 2005, p. 782 s : qui évoque l'objectif
de « faire de l'hypothèque une garantie plus souple, capable de garantir des relations suivies
de crédit et d'offrir une réelle alternative au cautionnement ».
5. V. Ch. Albigès, « L'hypothèque conventionnelle transfrontalière européenne », Dr. et
patr. juill. Août 2006, p. 74 ; E. Muniz-Espada, « L'eurohypothèque », D. 2007, p. 1712.
6. Sur ce mouvement, v. T. de Ravel d'Esclapon, « L'hypothèque, une sûreté décidément
bien en vue », D. 2008, p. 2021.
7. V. M. Grimaldi, « L'hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire », D. 2006,
p. 1294 s.
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