Hors collection - L'audition libre : de la pratique à la réforme - 151

LES CoNSÉquENCES DE LA rÉforME

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par là même la jurisprudence Salduz de la CEDH70 - que pour les auditions
libres menées avant l'entrée en vigueur des dispositions légales ayant imposé
la notification du droit au silence au suspect71. L'on peine à ne pas voir dans
cette protection a minima du droit de ne pas s'auto-incriminer le souci
de préserver des procédures rétrospectivement irrégulières au nom d'une
exigence ambivalente de sécurité juridique72.
24. La sanction nécessaire du non-respect du droit de se taire. Au vu
des considérations qui précèdent, on est en droit de s'interroger sur le sort
qui sera réservé aux auditions libres menées postérieurement à l'entrée en
vigueur de la loi du 27 mai 2014. De ce point de vue néanmoins, la consécration formelle du droit au silence par l'article 61-1 du Code de procédure
pénale paraît interdire toute application restrictive du droit pour le suspect
libre de ne pas contribuer à sa propre incrimination en cas de non-respect
de cette obligation. que la notification du droit au silence soit absente du
procès-verbal d'audition ou qu'il soit démontré qu'elle a été tardive ou
ambiguë, on ne voit pas comment la Cour de cassation pourrait désormais
refuser de constater l'irrégularité de l'audition libre et, partant, le retrait
des déclarations du dossier de la procédure sans contredire sa propre jurisprudence relative aux nullités de la garde à vue.
L'assimilation d'une telle violation à une nullité d'ordre public -
dispensant donc celui qui s'en prévaut d'avoir à rapporter la preuve d'un
grief - paraît d'autant plus évidente que la Chambre criminelle a affirmé,
dans une affaire jugée postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du
27 mai 2014 concernant la notification du droit au silence au stade du
70. Dans cet arrêt, la Cour de Strasbourg a considéré qu'« il est en principe porté une
atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations incriminantes faites
lors d'un interrogatoire de police subi sans assistance possible d'un avocat sont utilisées pour
fonder une condamnation » (CEDH, Salduz c/ Turquie, préc., § 55). La position de la
CEDH doit néanmoins être relativisée à la lumière d'autres arrêts où elle s'est montrée plus
ambiguë sur l'admissibilité des déclarations auto-incriminantes faites en méconnaissance du
droit à l'assistance d'un avocat (sur ce point, v. o. Bachelet, « Garde à vue : la persistante
religion de l'aveu », Gaz. Pal. 24 janvier 2012, p. 7).
71. Cass. Crim. 1 er septembre 2015, n° 14-87.489 ; Cass. Crim. 8 septembre 2015,
n° 14-83.053 et 14-83.026.
72. Cette position est-elle pour autant contraire aux exigences conventionnelles ? Si la
CEDH a expressément admis l'application du droit de garder le silence au suspect, qu'il
soit entendu librement ou non, elle ne semble pas - ou plus - considérer qu'il faille pour
autant nécessairement écarter les déclarations faites en violation d'un tel droit. à l'instar
de la Cour de cassation, les juges strasbourgeois ont tendance à distinguer les déclarations
non essentielles de celles dont la portée a été déterminante ou « susceptible de porter atteinte
à l'équité du procès pénal mené ultérieurement » (v. par exemple, au sujet d'une audition
libre, CEDH, 16 juin 2015, préc., § 39).

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