Hors collection - L'audition libre : de la pratique à la réforme - 22

ENJEu D'uNE prAtIquE profESSIoNNELLE

vérifient si en l'espèce il y a eu contrainte29. La question de la réalité de la
contrainte reste notamment posée lorsque la personne est ramenée dans
un véhicule de police et plus particulièrement lorsque son propre véhicule
a été amené au poste par un policier. à l'inverse, il n'y a pas contrainte
lorsque l'individu a été invité à suivre les policiers et qu'il a consenti à
venir. qu'est-ce qu'une invitation policière ? Les termes peuvent paraître
antinomiques. on voit que la légalité de la mesure repose sur une nuance
lexicale dont la subtilité peut échapper à celui qui subit la mesure. Est-ce
satisfaisant ?
22. Du cas de la minorité. un bémol a été apporté par la Cour de
cassation30 pour les mineurs auteurs d'infractions simples comme les vols
à l'étalage. En effet, interpellés et ramenés même sans contrainte dans un
véhicule de police, il ne peut être procédé immédiatement à l'audition libre
du mineur. Ceci conduit à mettre en garde à vue, avec tout ce que cela
comporte, un mineur et ce du seul fait de sa minorité dans un cas où un
majeur aurait pu être auditionné librement. on voit ressurgir d'anciens
travers d'interprétation de la Cour de cassation consistant à voir dans la
garde à vue une mesure de protection et le non placement sous ce statut,
un potentiel échec aux droits de la défense ce qui nous paraît paradoxal
et ce d'autant plus à compter du 2 juin 2014 où l'audition libre constitue
un cadre juridique à part entière et non plus une zone floue. Il conviendra
d'observer une évolution de cette solution jurisprudentielle antérieure à
la réforme de mai 2014. on peut aussi se demander si à travers cette jurisprudence, la chambre criminelle ne pose pas des jalons pour faire évoluer
la pratique sur cette notion d'invitation policière sus-évoquée.
Cette difficulté concernant les mineurs est désormais gérée soit par une
garde à vue soit par une remise à parents accompagnée d'une convocation
à une date ultérieure pour une audition libre. Ce côté saccadé du traitement
des affaires simples et généralement sans suite judiciaire pose des difficultés
aux services d'enquêtes par rapport au temps consacré à un dossier. La
police n'ayant pas plus de moyens aujourd'hui qu'hier, bien au contraire,
il y a nécessairement dans l'alourdissement du traitement des dossiers une
répercussion sur le nombre d'affaires traitées et élucidées.

29. J. Buisson, « Le placement en garde à vue », RSC 2001, p. 671 et s.
30. « Le mineur, conduit par les policiers auprès d'un officier de police judiciaire (OPJ) pour
être entendu sur une infraction qu'il est soupçonné d'avoir commise, se trouve nécessairement dans une situation de contrainte et doit bénéficier des droits attachés au placement
en garde à vue, prévus par l'article 4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 », Cass.
Crim. 6 novembre 2013, n° 13-84.320.

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