Hors collection - L'audition libre : de la pratique à la réforme - 34

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ENJEu D'uNE prAtIquE profESSIoNNELLE

pénaliste à aller au-delà de la qualification du mécanisme pour examiner sa
réalité et son éventuel impact sur les droits et libertés fondamentaux.
La recherche d'un encadrement ne doit pas pour autant confiner à la
naïveté et respecter le principe de gradation de la procédure pénale selon
lequel les garanties accordées doivent être en adéquation avec le statut
procédural de l'individu, dessiné en considération de la gravité des suspicions dont il fait l'objet. Les bonnes intentions législatives ne doivent pas
ignorer la pratique naturellement rétive aux lourdeurs procédurales et qui
crée alors, pour échapper à l'application des textes, des mécanismes profitant
du silence du code. L'encadrement toujours plus poussé de l'instruction
conduit les parquetiers à s'interroger à deux fois, en matière délictuelle,
avant de saisir un juge d'instruction. Sans doute les investigations possibles
sont-elles plus nombreuses et efficaces dans l'instruction - lorsque les
réalités budgétaires le permettent - mais l'enquête policière à l'avantage
de permettre au ministère public de conserver la maîtrise de l'affaire par sa
direction. Le Conseil constitutionnel, dans la décision qu'il a rendue sur
qpC le 30 juillet 2010, constate d'ailleurs qu'il y a eu 790 000 gardes à vue
en 2009, que le nombre de procédures soumises à l'instruction préparatoire
n'a cessé de diminuer pour ne plus concerner que 3 % des affaires, que
le souci d'assurer le traitement des affaires pénales en temps réel conduit
le ministère public à décider le déclenchement de l'action publique sur la
base du rapport de l'opJ avant la fin de la garde vue. « Si ces nouvelles
modalités de mise en œuvre de l'action publique ont permis une réponse
pénale plus rapide et plus diversifiée conformément à l'objectif de bonne
administration de la justice, il n'en résulte pas moins que, même dans des
procédures portant sur des faits complexes ou particulièrement graves, une
personne est désormais le plus souvent jugée sur la base des seuls éléments de
preuve rassemblés avant l'expiration de sa garde à vue, en particulier sur les
aveux qu'elle a pu faire pendant celle-ci ; que la garde à vue est ainsi souvent
devenue la phase principale de constitution du dossier de la procédure en vue
du jugement de la personne mise en cause »3. Ce constat justifie pleinement
un encadrement plus serré de la garde à vue devenue la phase clé des investigations policières ; mais la pratique ressent alors le besoin de développer
une phase antérieure permettant, notamment, de décider de la nécessité de
recourir à une garde à vue selon l'idée de gradation énoncée. La garde à
vue devenant un véritable palier de la procédure, essentielle à l'orientation
des dossiers, il convenait alors de rétablir une marche pour y accéder. C'est
ainsi que se développa l'audition libre dont il a été demandé au Conseil
constitutionnel si elle ne heurtait pas les principes supérieurs. L'organe de
3. Cons. constit. 30 juillet 2010, n° 2010-14/22 qpC, cons n° 16.
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