Hors collection - L'audition libre : de la pratique à la réforme - 93

L'ApprÉCIAtIoN DE L'AuDItIoN LIBrE

16. En outre, la loi du 14 avril 2011, sans institutionnaliser l'audition
libre consacrait deux hypothèses d'audition sans avocat32.
La première visée à l'article 73 du Code de procédure pénale concernait
l'enquête de flagrance, c'est-à-dire les cas où il existe des raisons plausibles
de soupçonner la commission d'une infraction mais où l'intéressé n'est
pas « tenu sous la contrainte de demeurer à la disposition des enquêteurs
ayant été informé qu'il peut à tout moment quitter les locaux de police ou
de gendarmerie ». C'est le cas des personnes appréhendées par des tiers.
La seconde était celle des articles 62 et 78 du Code de procédure pénale
où le témoin entendu librement dans le délai de quatre heures se révélait
suspect au cours de son audition sans contrainte. Il était déduit de la réforme
que la personne passant du statut de témoin à celui de suspect pouvait tout
de même être entendue librement dès lors qu'aucune contrainte n'était
exercée à son égard33. La personne ainsi entendue librement sans défenseur
pouvait être amenée lors de son audition à divulguer des éléments qui
permettraient ensuite de retenir des charges contre elle. pour autant, elle
ne bénéficiait pas des garanties propres à la personne gardée à vue comme
l'assistance d'un avocat ou le droit de se taire et par conséquent de ne pas
s'auto-incriminer.
La possibilité d'interroger une personne en audition libre résultait de
l'article 73 du Code de procédure pénale et d'une interprétation a contrario
des articles 62 et 78 du Code de procédure pénale et de la liberté laissée à
l'officier de police judiciaire de placer ou non une personne en garde à vue.
17. La Chambre criminelle et l'audition libre. En outre, après la
réforme du 14 avril 2011, à l'instar du Conseil constitutionnel, la Chambre
criminelle a continué à considérer que la personne soupçonnée qui était
entendue librement ne pouvait bénéficier des droits afférents à une mesure
de garde à vue.
Dans une décision 3 avril 201334, la Chambre criminelle s'est prononcée
sur la conformité à l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits
32. E. Daoud et C. Ghrénassia, « D'une garde à vue à l'autre : commentaire de la décision
n° 2011/194 du Conseil constitutionnel », RLDA, 2012, n° 69, qui parlent d'une « résurgence de l'audition, proposition du Gouvernement visant à contourner l'intervention de
l'avocat », p. 87.
33. N. Le Coz, « L'audition des personnes soupçonnées dans les enquêtes pénales », AJ
Pénal 2014, p. 320.
34. Cass. crim. 3 avril 2013, n° 12-88.428, Gaz. pal., 23 juillet 2013 n° 204, p. 40, obs.
f. fourment. Voir aussi Cass. Crim., 6 novembre 2007, n° 07-80.031.

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