Hors collection - L'audition libre : de la pratique à la réforme - 95

L'ApprÉCIAtIoN DE L'AuDItIoN LIBrE

garde à vue, l'audition libre n'a pas fait l'objet d'une définition. De la
même manière, les critères qui justifient une audition libre ne sont pas
prévus par le texte, l'on sait juste qu'elle ne pourra être mise en place que
lorsqu'aucune contrainte n'aura été exercée, elle sera donc impossible après
une interpellation ou tout autre mesure de contrainte. Elle reste une garde
à vue sans contrainte, mais désormais avec des droits.
21. La réforme et le nouvel article 61-1 du Code de procédure pénale.
Sous l'impulsion de l'union européenne, la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014,
a réformé l'audition libre et créé un nouvel article 61-1 dans le Code de
procédure pénale. La réforme de l'audition libre est le fait de la transposition de la directive 2012/13/uE du parlement européen et du Conseil du
22 mai 2012 relative au « Droit à l'information dans les procédures pénales
nationales » et d'une partie de la directive 2013/48/uE dite « Droit d'accès
à un avocat » dont la date de transposition est fixée à 201636.
Cette loi met à mal le critère autrefois utilisé pour délimiter la mise en
place ou non d'une garde à vue « la contrainte » et donc la notification
des droits afférents à cette mesure. Le nouveau critère utilisé est celui du
« soupçon » dont l'appréciation est sans aucun doute plus fuyante et sera
l'apanage a posteriori des juges du fond.
La nouvelle loi permet (enfin !) de mettre en conformité le droit interne
avec le droit de la Convention européenne des droits de l'Homme puisque
dès l'arrêt Salduz, la Cour a considéré que le droit à l'avocat devait être
« consenti dès le premier interrogatoire d'un suspect par la police37 ».
Les travaux parlementaires qui ont précédé la réforme ont tenu à préciser
que l'audition libre ne pouvait pas concerner « un suspect » mais uniquement
« une personne soupçonnée ». toutefois, la différenciation est difficile et
reste sujette à réflexions. Le terme suspect étant réservé au gardé à vue38,
cela ajoute à la confusion.

36. Directives qui résultent de la mise en œuvre de la résolution du Conseil (2009/
C295/01) du 30 novembre 2009 qui charge la commission européenne d'appliquer par le
biais de directives une feuille de route comportant 6 catégories de mesures procédurales -
les mesures « B » information relatives aux droits et à l'accusation et « C » assistance d'un
conseiller juridique et aide juridictionnelle sont celles qui sont appliquées en l'espèce.
37. Arrêt précité, § 55, voir en ce sens l'arrêt CEDH, 9 avril 2015, A.T c/ Luxembourg,
req. n° 30460/13.
38. rapp. de la commission mixte paritaire du 13 mai 2014, AN n° 1934 et Sénat n° 527,
p. 5 et s.

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