Précis Domat - Droit parlementaire - 6e - 132

DROIT PARLEMENTAIRE

À preuve, la consécration du critère organique par l'arrêté du 14 mai 1963 du
Bureau de l'Assemblée nationale : ces règles font partie intégrante, depuis
l'époque révolutionnaire, d'une organisation administrative autonome que les
assemblées parlementaires ont toujours régie souverainement.
Cependant, l'immunité juridictionnelle, et le sentiment de déni de justice qui en
résulte, ne pouvait guère se concilier avec la logique de l'État de droit. Il était choquant, en effet, que le législateur, dans ses relations avec ses agents, pût en être
affranchi, tout en en étant, par ailleurs, le promoteur. L'auteur de la loi se comportait ainsi en souverain, au-dessus de la loi.
Suivant l'inclination du Conseil d'État qui se résignait mal à cette situation à
partir de l'arrêt Girard30, une prise de conscience devait se concrétiser en faveur
de garanties minimales au profit des fonctionnaires parlementaires.
I. C'est ainsi que l'article 8 de l'ordonnance 58-1100 du 17 novembre 1958
relative au fonctionnement des assemblées parlementaires31 récuse la solution antérieure en disposant que la juridiction administrative est appelée à connaître tous
les litiges d'ordre individuel concernant les agents des services des assemblées
parlementaires.32.
Le changement constitutionnel opéré par l'avènement de la Ve République a
précipité l'évolution. Sachant que le décret du 12 mai 1959 avait procédé au licenciement du personnel de l'ancienne Assemblée de l'Union française, aucune obligation ne pouvant, au reste, être retenue à la charge de l'État de reclasser les agents
titulaires de ces emplois (CE, 4 novembre 1960, Syndicat du personnel de l'Assemblée de l'Union française, AJDA, 1960, I., p. 188, II, p. 376), la crainte s'est manifestée, en 1962, au moment de la crise ouverte entre le Sénat dans l'adversité
(J. Georgel) et le pouvoir exécutif, que ce précédent ne fasse école. Un amendement destiné à se prémunir contre cet aléa, déposé par les questeurs de l'Assemblée
nationale, sera à l'origine de l'article 72-II de la loi de finances pour 1963 susmentionnée.
Ce dernier attribue, pour la première fois, la qualité de fonctionnaires de l'État
aux agents titulaires des services des assemblées parlementaires, tout en les soustrayant, d'une part, au statut général des fonctionnaires, défini par l'ordonnance 59244 du 4 février 1959, et en rappelant, d'autre part, la compétence traditionnelle,
conférée au Bureau, de déterminer leur statut et leur régime de retraite.
Sur ces entrefaites, l'article 3 de la loi 75-599 du 10 juillet 1975, confirmé par la
loi 82-380 du 7 mai 1982, consacre, à l'initiative de Jean Foyer, le principe de
l'égalité des sexes, posé par le préambule de la Constitution de 1946, égalité à
rebours, puisqu'il s'est agi d'autoriser les hommes à se présenter au concours de
secrétaire des services.
II. Brochant sur le tout, l'article 31 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant
droits et obligations des fonctionnaires est venu limiter la portée de la règle traditionnelle, aux termes de laquelle il appartient « au Bureau de déterminer par un
règlement intérieur l'organisation et le fonctionnement des services... ainsi que le

■ 30. 31 mai 1957 D.1957, p. 430, concl. E. Guldner.
■ 31. V. J.-M. A , AJDA, 1959, I., p. 101.
■ 32. V. Actes parlementaires nº 226.
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