Droit et Économie - La petite entreprise - 86

86 LA PETITE ENTREPRISE

civile42, qu'un débiteur puisse être condamné, sur le fondement de la responsabilité contractuelle à verser des dommages-intérêts punitifs, et cela
même qu'une telle condamnation ne serait pas per se contraire à l'ordre
public43. Si la notion de faute lucrative est ignorée du droit français, et
peu mise en valeur dans les projets européens44, elle a bénéficié d'une
reconnaissance importante dans les droits de common law. Par le biais du
concept d'exemplary damages en droit anglais ou de punitive damages en
droit américain, ces deux droits sanctionnent depuis longtemps les fautes
lucratives45.
Le droit de la consommation prévoit, par exemple, qu'en cas de publicité
trompeuse, l'amende encourue puisse priver le professionnel des bénéfices.
L'amende, par principe plafonnée, peut être élevée, notamment au regard
de la qualité du professionnel. Reste à déterminer si le droit de la consommation prend en compte, en la matière, la petite entreprise. La lecture du
Code de la consommation permet une position nuancée. De prime abord,
celle-ci mériterait d'être négative. Là encore, pas de référence à la notion
de petite entreprise, voire même d'entreprise plus généralement. Néanmoins, certains articles du Code civil opèrent une distinction qui réintroduit l'idée de la prise en compte de la taille de l'entreprise.

B. La légitimité du double critère : la forme de la petite entreprise
et le chiffre d'affaires
L'article L. 131-3 du Code de la consommation réalise, s'agissant de l'amende
encourue en cas de non-divulgation de certaines informations, une distinction entre deux plafonds des amendes, et cela en fonction de la qualité du
professionnel. L'amende du professionnel, personne physique, est à hauteur
de 75 000 euros, tandis que celle du professionnel, personne morale, est de
42. Avant-projet de réforme de la responsabilité civile du 13 mars 2017, art. 1266-1. Voir déjà :
art. 1371 de l'avant-projet de réforme de du droit des obligations et du droit de la responsabilité civile, 2005, rapport de Catala P. : « l'auteur d'une faute délibérée, et notamment d'une
faute pénale lucrative, peut être condamné, outre les dommages-intérêts compensatoires, à
des dommages-intérêts punitifs ». La partie relative à la responsabilité a été confiée au professeur G. Viney. Plus largement sur la faute lucrative : JAULT A., La notion de peine privée, préf.
Chabas F., 2005, LGDJ, Bibl. droit privé, t. 442.
43. La Cour de cassation considère que « le principe d'une condamnation à des dommages-intérêts
punitifs n'est pas en soi contraire à l'ordre public » : Cass. 1re civ., 1er décembre 2010, D. 2011, 24,
obs. GALLMEISTER I. ; D. 2011, 423, note LICARI F.-X. ; JCP G 2011, 140, note JUVÉNAL J. ; JCP G 2011,
435, 11, obs. STOFFEL-MUNCK Ph. ; RTD civ. 2011, 317, obs. RÉMY-CORLAY P. ; RDC 2011, 459, obs.
CARVAL S.
44. Les principes de droit européen du droit de la responsabilité ne consacrent ni la notion de
faute lucrative, ni celle de dommages-intérêts punitifs.
45. Voir not. pour le droit anglais : Kuddus v. Chief Constable of Leicestershire Constabulary (2001)
UKHL 29 ; Ruxley Electronics & Construction Ltd v. Forsyth (1996) AC 344 (HL).
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