Droit et Économie - La petite entreprise - 94

94 LA PETITE ENTREPRISE

Les cadres de ces petites structures demeurent alors soumis au droit commun de la durée du travail, avec un décompte du temps de travail en heures sur la semaine ou sur un multiple de la semaine, ce qui peut être source
de difficultés pour l'entreprise lorsque le cadre en question est amené à
réaliser de nombreuses heures de travail. Manifestement, le cadre de la
moyenne ou grande entreprise en capacité de négocier un accord collectif
pourra relever du régime du forfait annuel en jours, sans paiement d'heures supplémentaires puisque le temps de travail se décompte alors en jours
sur l'année sans référence horaire, alors que celui de la petite entreprise
sera généralement soumis à un décompte horaire du temps de travail avec
parfois des montants d'heures supplémentaires importants à la charge de
l'employeur. Il ne paraît guère opportun de continuer à favoriser de la
sorte l'entreprise dotée de l'ensemble des instances représentatives du personnel et capable d'élaborer son propre statut collectif. Ce d'autant que sur
le terrain du forfait annuel en jours, le législateur ne prévoit nullement la
possibilité de mettre en place un tel dispositif unilatéralement : si l'employeur conclut néanmoins une convention individuelle de forfait annuel
en jours avec un cadre sans le moindre socle conventionnel l'autorisant, la
convention individuelle est frappée de nullité18. Une avancée tout de
même doit être signalée en ce domaine, ce d'autant qu'elle a vocation à
bénéficier, pour une fois, aux petites structures comme aux entreprises
plus importantes ; en effet, dans l'hypothèse où l'accord de branche autorisant le recours au forfait annuel en jours sur l'année est incomplet notamment au regard des exigences de protection du droit à la santé, l'employeur
demeure autorisé, avec la loi du 8 août 2016, à poursuivre ou à conclure de
nouvelles conventions individuelles de forfait jours, sous réserve qu'il comble ces carences unilatéralement : la régularisation par décision unilatérale
est sur ce point la bienvenue19.

§ 2. L'impossibilité d'adapter son statut collectif
Le droit de la durée du travail et des congés donne également de nombreux exemples où il est possible de déroger aux dispositions supplétives
du Code du travail par accord collectif. Pour autant, si rien n'est prévu au
niveau de la branche pour déroger aux règles supplétives du Code du travail parfois inadaptées à sa propre situation, la petite entreprise se trouvera
18. C'est également la nullité de la convention individuelle qui est prononcée lorsque l'accord
collectif autorisant le recours au forfait annuel en jours sur l'année ne répond pas aux exigences de protection du droit à la santé et au repos exigées par la jurisprudence (Cass. soc.,
31 janvier 2012, Bull. civ. V, nº 43 ; Dr. soc. 2012, p. 537, obs. ANTONMATTEI P.-H. ; JCP S 2012,
1220, note MORAND M.) et, désormais, par la loi.
19. MORAND M., « Clarification et sécurisation des conventions de forfait », JCP S, 2016, 1295, spéc.
nº 21 et s.

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