Hors collection - L'exécution des sentences arbitrales internationales - 186

L'EXÉCUTION DES  SENTENCES ARBITRALES INTERNATIONALES

étendre excessivement la compétence internationale du juge français383. Par conséquent, le créancier doit directement mettre en œuvre une mesure d'exécution, en
incluant les intérêts moratoires dans le décompte de sa créance, et ce n'est qu'en
cas de contestation, par le débiteur, du montant indiqué dans l'acte de saisi que le
juge de l'exécution aura à connaître du problème.
110. En revanche, si la sentence s'est prononcée sur la question des intérêts moratoires, fût-ce en en refusant le bénéfice, le juge de l'exécution ne peut en accorder
car cela reviendrait à modifier le titre384. Cela dit, vérifier si le tribunal arbitral a
rendu une décision en matière d'intérêts moratoires n'est pas toujours aisé. Dans
une espèce, le créancier avait demandé, au cours de l'arbitrage, la condamnation
du débiteur à payer les intérêts, calculés au taux légal sur le principal. La sentence
avait condamné le débiteur à payer le capital de la dette et rejeté ses « demandes
plus amples et contraires ». Le juge de l'exécution a alors considéré que cette formule
valait seulement comme rejet des demandes principales plus amples et, à défaut de
précision explicite dans les motifs ou de rejet non équivoque dans le dispositif, ne
concernait pas la demande d'intérêts. Le juge devait donc en déduire que le tribunal
arbitral ne s'était pas prononcé sur la demande d'intérêts et, en conséquence, valider
la saisie pratiquée pour une somme incluant les intérêts moratoires au taux légal,
décomptés depuis le prononcé de la sentence385. Cette solution ne convainc pas, car
le rejet de toutes les demandes non spécifiquement tranchées dans le dispositif
vaut, en principe, pour l'ensemble des demandes et pas seulement celles relevant
du principal.
111. Précisons enfin que la compétence du juge de l'exécution pour prononcer des
intérêts moratoires au taux légal dans le silence de la sentence n'est pas exclusive de
celle du tribunal arbitral, qui peut, à la suite d'un recours en interprétation386, préciser
lui-même que la condamnation qu'il a prononcée doit porter intérêts au taux légal387.
Ainsi, lorsque la désignation du taux d'intérêt est trop ambiguë pour permettre au
juge de l'exécution de les calculer, le tribunal arbitral peut, lui, préciser le sens de
sa décision puisque, précisément, c'est sa décision388. Encore faut-il le saisir dans le
délai prévu par la loi389 ou par le règlement d'arbitrage applicable390.
Dans le même ordre d'idées, une sentence peut condamner un débiteur à payer
des intérêts pour n'avoir pas exécuté une précédente sentence, du moins s'il est

383. v. supra n° 29 à 33.
384. Orion Satellite Communications c. Russian Satellite Communications Company (versailles, mars 2016), préc. note 72.
385. CA Metz, 30 juill. 2013, RG n° 13/00515, 10/01983, Frappe c. Lepar, Juris-Data n° 2013-018148.
386. CPC, art. 1486, al. 1er et 1506, 4°.
387. Cass. 1re civ., 9 janv. 2007, n° 04-10719, Crédit Mutuel Nord Europe c. Delubac (sté).
388. Orion Satellite Communications c. Russian Satellite Communications Company (CA versailles, juill. et mars 2016),
préc. note 72.
389. CPC, art. 1485, al. 2 et 1506, 4°.
390. Par ex. : Règl. arb. CCI, art. 35.2 : trente jours ; Règl. CMAP, art. 28.3 : trois mois.

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