Hors collection - L'exécution des sentences arbitrales internationales - 197

LE RETOUR EN FORCE DE L'IMMUNITÉ D'EXÉCUTION

référence à un règlement d'arbitrage suffit, mais il n'est pas possible d'affirmer que
la convention d'arbitrage vaut en elle-même renonciation.
C - LE RETOUR À L'EXIGENCE D'UNE RENONCIATION EXPRESSE ET SPÉCIALE

Cette évolution est remise en cause dix ans plus tard, avec les arrêts NML Capital du
28 septembre 20114 et du 28 mars 20135. La Cour de cassation juge que la renonciation à l'immunité d'exécution doit être expresse et spéciale.
Cette condition est d'abord appliquée aux biens des missions diplomatiques. La Cour
de cassation énonce dans son arrêt du 28 septembre 2011 que « les missions diplomatiques des États étrangers bénéficient [...] d'une immunité d'exécution autonome à
laquelle il ne peut être renoncé que de façon expresse et spéciale. L'exigence de spécialité signifie que les biens faisant l'objet de la renonciation doivent être désignés et
limitativement énumérés. La Cour de cassation utilise le visa du droit international
coutumier pour laisser de côté la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les
relations diplomatiques. Cette Convention pose comme seule condition à la renonciation à l'immunité diplomatique le caractère exprès de cette renonciation. Le fait
que la Cour de cassation ait fondé sa décision sur le droit international coutumier
montre qu'elle estime que celui-ci a évolué vers plus de rigueur que la convention
de Vienne de 1961.
L'arrêt du 28 mars 2013 poursuit l'évolution en direction d'une appréciation plus
restrictive de la renonciation à l'immunité d'exécution. La Cour de cassation étend
l'exigence d'une renonciation expresse et spéciale à tous les biens destinés au service
public : « si les États peuvent renoncer, par contrat écrit, à leur immunité d'exécution
sur des biens ou des catégories de biens utilisés ou destinés à être utilisés à des fins
publiques, il ne peut y être renoncé que de manière expresse et spéciale ». La renonciation doit désormais être expresse et spéciale « par contrat écrit ». C'est un retour
en arrière par rapport à l'arrêt Creighton qui prévoyait que la simple référence dans
la convention d'arbitrage, au règlement CCI valait renonciation à l'immunité d'exécution. En outre, l'exigence d'une renonciation spéciale est particulièrement stricte.
La clause de renonciation doit mentionner : « les biens ou les catégories de biens pour
lesquels la renonciation est consentie ».
Cette fois-ci, la Cour de cassation fonde son argumentation sur « le droit international
coutumier, tel que reflété par la convention des Nations unies du 2 décembre 2004 »
sur l'immunité juridictionnelle des États et de leurs biens. La jurisprudence semble
se stabiliser en adoptant les conditions posées par une convention internationale
récemment ratifiée par la France et appelée à entrer en vigueur prochainement.

4. Cass. 1 re civ., 28 sept. 2011, n° 09-72057, NML Capital Ltd c. République Argentine, D. 2011, p. 2412 ;
Rev. crit. DIP 2012, p. 124, note H. gaudemet-talloN ; JDI 2012, comm. 9, p. 668, note G. CuNiBerti.
5. Cass. 1re civ., 28 mars 2013, n° 10-25938, NML c. République d'Argentine et Total Austral, D. 2013, p. 1728, note
D. martel ; ibid., p. 1574, obs. A. leBorgNe ; ibid., p. 2293, obs. L. d'avout et S. Bollée ; Rev. crit. DIP 2013, p. 671,
note H. muir Watt ; RTD civ. 2013, p. 437, obs. R. Perrot ; ibid., 2014, p. 319, obs. L. usuNier.

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