Hors collection - L'exécution des sentences arbitrales internationales - 201

L'exécution des sentences arbitrales
d'investissement
Elie Kleiman
Avocat à la Cour, Associé Freshfields Bruckhaus Deringer LLP

1. En ce qu'elle implique la mise en œuvre de mesures de contrainte contre un État,
et non une personne morale de droit privé, l'exécution des sentences arbitrales
d'investissement occupe une place à part dans le droit de l'arbitrage international
et se distingue, à ce titre, de l'exécution des sentences rendues en matière d'arbitrage commercial. C'est bien l'exécution par la partie privée (l'investisseur) contre
l'État qui justifie ce particularisme. L'hypothèse inverse où l'État est la partie victorieuse - statistiquement majoritaire1 - ne soulève pas de difficultés remarquables :
en pratique, il s'agit pour l'État, défendeur victorieux à l'arbitrage qui a obtenu une
sentence d'incompétence ou de débouté, d'opposer la force de chose jugée à de
nouvelles revendications portées devant d'autres fors et le cas échéant d'exécuter
une condamnation mettant à la charge du demandeur les frais de l'arbitrage. La
situation est toute autre lorsque c'est le demandeur qui, l'ayant emporté, se heurte
au refus d'exécution de la part de l'État.
2. Il est souvent remarqué que le taux d'exécution spontanée des sentences rendues
contre les États, qu'elles l'aient été ou non dans le cadre du CIRDI, est très élevé2.
Il serait toutefois erroné de penser que le problème de l'exécution des sentences
arbitrales d'investissement ne se pose pas, ou si peu qu'il ne mérite pas d'être
évoqué. De fait, les défauts d'exécution ne sont pas chose rare dans le monde de
l'arbitrage d'investissement ; on peut même penser que la situation tend à se multiplier en période de crise économique mondialisée et les exemples ne manquent pas :
l'Argentine, le Congo, le Kazakhstan, le Liberia, le Sénégal ou encore le Venezuela
font partie des États connus pour ne pas exécuter spontanément, de façon systématique ou occasionnelle, les sentences d'investissement3. Le problème de l'exécution
des sentences d'investissement est donc réel et susceptible de mettre à l'épreuve
toute la fiabilité du système aux yeux des investisseurs.

1. voir par exemple : http://www.iisd.org/itn/wp-content/uploads/2015/06/itn-breaking-news-june-2015-isds-whowins-more-investors-or-state.pdf.
2. P. PolaseK et S. T. toNova, "Chapter 12: Enforcement against States", in WTO litigation, investment arbitration and
commercial arbitration, J. A. Huerta goldmaN, A. romaNetti, F. X. stirNimaNN (eds), 2013, p. 373.
3. J. M. HuNter and J. garCia olmedo, 'Enforcement/Execution' of ICSID Awards Against Reluctant States, 12 J World
Inv Trade 307 (2011), p. 312.

201

http://www.iisd.org/itn/wp-content/uploads/2015/06/itn-breaking-news-june-2015-isds-who

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