Hors collection - L'exécution des sentences arbitrales internationales - 80

L'EXÉCUTION DES SENTENCES ARBITRALES INTERNATIONALES

Julie Klein. - Pour moi, ça n'est pas possible. Il faut repartir de la sentence.
Jacques Pellerin. - La Cour de cassation a déjà décidé que l'ordonnance n'avait
d'effet que sur le territoire français.
Guy Lepage. - Il y a des cas dérogatoires, où cela a été possible d'obtenir l'exequatur
sur la base d'une décision étrangère d'exequatur. Je crois qu'il y a une décision d'une
juridiction canadienne en ce sens pour un jugement d'exequatur français.
Denis Mouralis. - Ce qui est possible, c'est que l'ordonnance d'exequatur soit un
élément.
Julie Klein. - Cela peut-être une présomption de légitimité de la sentence.
Sylvestre Tandeau de Marsac. - Il y a un point qui n'a pas été abordé, c'est celui de
l'exécution aux risques et périls du créancier et des recours possibles. La jurisprudence sur ce sujet est de plus en plus exigeante. À l'occasion d'une affaire récente
jugée par la cour d'appel de Paris, la partie débitrice contre laquelle l'exécution provisoire avait été poursuivie a pu obtenir des dommages et intérêts de plusieurs millions
d'euros après infirmation du jugement exécuté. On a évoqué des mesures conservatoires ainsi que l'exécution de sentences susceptibles d'être jugées prescrites :
a-t-on vu apparaître des contentieux en responsabilité du créancier qui poursuit
l'exécution, sachant qu'il s'agit, en droit français, d'une responsabilité sans faute ?
Question subsidiaire : quel est le juge compétent pour ce type de contentieux ?
Jacques Pellerin. - Votre remarque pourrait s'appliquer à la sentence interne qui
peut être assortie de l'exécution provisoire. Dans ce cas, l'exécution demandée par
la partie qui a obtenu gain de cause est, effectivement, à ses risques et périls et la
compétence pour en connaître devrait être dévolue au JEX.
En revanche, pour les sentences internationales, l'article 1526 supprime l'effet
suspensif du recours de sorte qu'il ne s'agit plus d'exécution provisoire, mais d'exécution immédiate dont la mise en œuvre ne saurait être à la charge des risques et
périls du bénéficiaire. Dès lors, seule une responsabilité pour faute pourrait être
encourue du fait de l'exécution de la sentence. Il resterait donc à se demander si
l'exécution forcée d'une sentence internationale prescrite constituerait une faute ?
Pour ma part, je ne le pense pas : la prescription est un moyen de défense d'intérêt
privé et il revient au défendeur de le soulever. Il me semble que seule une volonté
de nuire serait de nature à engager la responsabilité de la partie qui exécute une
telle sentence.
Denis Mouralis. - À partir du moment où l'on envisage l'exécution forcée d'une
sentence, on tombe dans le cas général prévu par le Code des procédures civiles
d'exécution : une mesure d'exécution inutile ou abusive peut engager la responsabilité
du créancier. C'est très rare, mais il y en a un exemple en 2014. L'arrêt reproche au
créancier d'avoir exécuté partiellement la sentence.

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