Systèmes Cours - Droit du marché intérieur européen - 5e - 214

Droit du marché intérieur européen

De manière plus spécifique, dans le domaine de l'acquisition de biens
fonciers, une raison impérieuse liée à l'objectif d'aménagement du territoire
a été reconnue par la Cour. Après avoir jugé que constituait une restriction
discriminatoire à la libre circulation des capitaux une disposition exemptant
les seuls ressortissants nationaux d'avoir à obtenir une autorisation pour
acquérir un bien foncier et à démontrer que l'acquisition projetée ne devait
pas servir à l'établissement d'une résidence secondaire, la Cour de justice
dans le même arrêt (arrêt du 1er juin 1999, Konle, aff. C-302/97) a admis que
l'exigence généralisée d'une autorisation préalable pour ce type d'opération
pouvait se justifier par un objectif d'aménagement du territoire tel que le
maintien, dans l'intérêt général, d'une population permanente et d'une
activité économique autonome par rapport au secteur touristique dans
certaines régions.
Mais encore convient-il que l'autorisation préalable ne soit pas mise en
œuvre de manière discriminatoire - ce qui était le cas en l'espèce, le
contrôle administratif étant plus approfondi sur les demandes émanant
d'étrangers et les nationaux étant seuls à pouvoir bénéficier d'une
procédure d'autorisation accélérée - et qu'il n'existe pas une autre
procédure moins contraignante permettant d'aboutir au même résultat : or
tel est bien le cas d'un mécanisme de déclaration préalable assorti de
sanctions efficaces telles que des amendes, l'obligation de mettre fin à
l'utilisation illicite du bien sous peine de mise en vente forcée et la
constatation de la nullité de la vente. Si, en l'espèce, la procédure en cause
a été jugée comme une restriction injustifiée à la libre circulation des
capitaux, le raisonnement suivi par la Cour ouvre aux États, au moins pour
une catégorie d'investissements, un droit, pour des raisons d'intérêt
général, à édicter une mesure restrictive et à en assurer le respect (dans
le même sens : arrêt du 5 mars 2002, H. Reisch, préc. et arrêt du 15 mai
2003, Doris Salzmann, aff. C-300/01, dans le cadre d'une situation purement
interne).
Dans le même ordre d'idées, la Cour a retenu en tant qu'exigence
impérieuse d'intérêt général, la maîtrise de l'évolution des structures
foncières agricoles tout en jugeant en l'espèce que l'exigence que
l'acquéreur exploite lui-même le terrain dans le cadre d'une exploitation
dans laquelle il a aussi sa résidence n'était pas proportionnée à l'objectif
poursuivi (arrêt du 23 septembre 2003, Ospelt, aff. C-452/01 ; dans le même
sens, à propos de la lutte contre la spéculation foncière et de la soumission
de l'acquisition d'un domaine agricole à la condition d'y fixer sa résidence
pour une durée minimale de huit ans : arrêt du 25 janvier 2007, Festersen,
aff. C-370/05). N'est pas non plus jugée contraire à l'art. 63 TFUE une
charge sociale imposée par la région flamande à certains opérateurs
économiques pour garantir une offre de logements suffisante à des
personnes à faibles revenus (arrêt du 8 mai 2013, Libert ea, aff. jtes C-197/
11 et 203/11).

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