Droit et Économie - Régulation et jeux d'argent et de hasard - 18

18 RÉGULATION ET JEUX D'ARGENT ET DE HASARD

généralement à la notion même de régulation dans les sociétés démocratiques modernes. Et c'est l'objet de cette première séance plénière.
Dans son rapport public de 2001 sur les autorités administratives indépendantes, le Conseil d'État analysait l'émergence de ces nouvelles organisations en soulignant qu'elles correspondaient à un vaste mouvement de
renouvellement de la répartition et de l'exercice du pouvoir de l'État. Il y
voyait plusieurs explications : méfiance et suspicion vis-à-vis de l'État traditionnel, mettant en doute son impartialité son efficacité ; aspiration à de
nouveaux modes de régulation sociale, reposant sur la médiation et le compromis ; recherche de nouvelles modalités de l'action publique, privilégiant
la mise en œuvre effective sur le strict respect de la norme juridique. Cette
notion à l'époque nouvelle de régulation sociale était donc déjà présente, il
n'est pas étonnant aujourd'hui de constater qu'elle apparaissait à l'occasion
de ce travail sur les AAI, qui s'étaient affirmées depuis une vingtaine d'années comme un des instruments privilégiés de la régulation.
Et ce sont bien deux autorités administratives indépendantes, l'autorité de
la concurrence et l'autorité de régulation des jeux en ligne qui se partagent
désormais l'essentiel de la régulation en matière de jeux, traduisant ainsi
concrètement le passage de la prohibition à la réglementation, et de la
réglementation à la régulation.
Et si on s'interroge sur les raisons qui ont conduit l'État à adopter ce mode
d'action publique s'agissant des jeux, un bref regard sur l'objet des autorités administratives indépendantes qui s'occupent de régulation donne un
premier indice : commission de régulation de l'énergie, autorité de régulation des communications électroniques et des postes, autorité de régulation
des activités financières... dans tous les cas, il s'agit de mettre de l'ordre ou
d'assurer le développement harmonieux dans un secteur qui vient de subir
ce traumatisme affreux, presque insoutenable dans un pays tel que le nôtre,
je veux bien entendu parler de l'ouverture à la concurrence. Il faudrait
même, pour être complet, ajouter qu'il s'agit toujours de secteurs dont l'ouverture à la concurrence est venue de (presque) l'extérieur, à savoir
l'Union européenne.
Dans tous les cas que je viens d'évoquer, y compris celui des jeux en ligne
d'ailleurs, il s'agit pour l'État, dirait-on, d'accompagner un mouvement qui
semble presque subi, et qui de surcroît va affecter de manière significative
de vieux monopoles publics, en mettant en place cette fameuse « régulation » destinée tout à la fois à succéder aux vieilles prohibitions devenues
insoutenables tout en préservant, ou au moins en affichant divers impératifs
d'intérêt général qui, selon les cas, iront de la garantie de l'approvisionnement en énergie à la sécurité des personnes transportées en passant par la
protection des mineurs.
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