Droit du paiement - Procédures civiles d'exécution - 154

PROCÉDURES CIVILES D'EXÉCUTION

exécutoire39. Quoi qu'il en soit, pour faire prononcer l'annulation d'une saisie-attribution
pratiquée au cours de cette période, le demandeur40 devra démontrer, outre la réalisation
de la saisie au cours de cette période, la mauvaise foi du créancier, c'est-à-dire sa
connaissance de la cessation des paiements de son débiteur, au moment où il a pratiqué
la saisie. De façon judicieuse, la jurisprudence décide que la connaissance qu'a l'huissier
de justice de l'état de cessation des paiements du débiteur n'implique pas celle de son
mandant41 ; la solution s'explique par le secret professionnel auquel est tenu l'huissier
de justice, qui ne peut dévoiler la connaissance qu'il a de la situation du débiteur,
notamment en vertu des autres mandats de recouvrement qui lui sont confiés.

2 - Les limites de l'effet attributif immédiat
384 Disponibilité de la créance saisie. − Il résulte de l'article L. 211-2 du Code des procédures civiles d'exécution que, pour que joue l'effet attributif de la saisie-attribution, la
créance objet de la saisie doit être « disponible entre les mains du tiers ». La formule
n'est pas forcément très heureuse car, pour le tiers saisi, il s'agit d'une dette, dont le
tiers saisi ne saurait disposer. Ce que vise le texte, ce sont les cas dans lesquels la
créance ne peut, techniquement, être transférée dans le patrimoine du poursuivant. La
saisie-attribution est possible car la créance objet de la saisie existe dans le patrimoine
du débiteur et est saisissable42. Mais son effet attributif est, au moins temporairement,
neutralisé43. L'indisponibilité de la créance saisie peut tenir à une affectation spéciale
de la créance saisie ou à l'existence d'une saisie antérieure.
385 Indisponibilité tenant à une affectation spéciale. − À l'occasion de la cession volontaire
de certains biens du débiteur, la créance de prix du vendeur est affectée à certains créanciers, affectation qui ne saurait être contrariée par l'exercice d'une saisie-attribution
pratiquée par l'un d'eux. Ainsi en est-il, d'abord, du prix de vente d'un fonds de
commerce, qui est indisponible pendant le délai d'opposition ouvert aux créanciers du
vendeur, et même au delà en cas d'opposition (C. com., art. L. 141-14)44. Le législateur
souhaite que, pendant ce délai, tout créancier du vendeur de fonds de commerce puisse,
par la technique de l'opposition, faire valoir ses droits sur la créance de prix de cession.
Si une saisie-attribution est pratiquée dans ce délai et que des oppositions le sont
ensuite, mais toujours dans le délai, le créancier opposant et le créancier saisissant viendront en concours, selon leur rang45.

La jurisprudence considère pareillement que le prix de vente d'un immeuble grevé
d'hypothèques ou de privilèges spéciaux immobiliers est affecté prioritairement au paiement des créanciers inscrits sur cet immeuble46. La règle est aujourd'hui énoncée par
l'article 2475 du Code civil et résulte d'impératifs de logique ; admettre une attribution

(39) La perspective est d'autant plus discutable que la Cour de cassation ne fixe pas d'autres limites temporelle à une
telle action que le jour où les organes ayant qualité pour agir cessent d'être en fonction, Cass. com., 21 sept.
2010, nº 08-21030 : Bull. civ. 2010, IV, nº 140 ; Act. proc. coll. 2010-19, nº 261, obs. F. REILLE ; Gaz. Pal.
7-8 janv. 2011, p. 37, note P. ROUSSEL GALLE.
(40) Il s'agira du mandataire judiciaire, de l'administrateur, du liquidateur, du commissaire à l'exécution du plan ainsi
que du ministère public (C. com., art. L. 632-4 et L. 641-14).
(41) Cass. com., 2 déc. 2014, nº 13-25705, Bull. civ. IV, nº 178 ; Gaz. Pal. 5 mai 2015, p. 36, obs. P. ROUSSEL GALLE et
5 sept. 2015, p. 14, obs. C. BRENNER ; Procédures 2015, comm. 33, obs. C. LAPORTE.
(42) Cass. 2e civ., 14 oct. 1999, nº 97-19502 ; Bull. civ. II, nº 157 ; RTD civ. 2000, p. 169, obs. R. PERROT.
(43) O. SALVAT, « La saisie-attribution d'une créance de somme d'argent indisponible », LPA 19 avr. 2001, p. 4.
(44) Le délai est de dix jours et court à compter de la publication de la vente au BODACC.
(45) Cass. 2e civ., 16 mars 2000, nº 98-14725, Bull. civ. II, nº 49 ; RTD com. 2000, p. 589, obs. J. DERRUPPÉ.
(46) Cass. 2e civ., 15 janvier 1992, nº 90-15876 ; Bull. civ. II, nº 18 ; sur cet arrêt, v. F. VAUVILLÉ, « La saisie de la créance
du prix de vente d'un immeuble (réflexions à propos de l'arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de
cassation du 15 janvier 1992), JCP N. 1993, 415. S'agissant de la vente d'un lot de copropriété, l'indisponibilité
de la créance de prix concerne également le privilège du syndicat, qui est occulte ; elle résulte de l'opposition du
syndicat au paiement du prix (L. nº 65-557 du 19 juil. 1965, art. 20).

154

http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=90-15876 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=90-15876 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=90-15876 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=90-15876 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=90-15876

Droit du paiement - Procédures civiles d'exécution

Table des matières de la publication Droit du paiement - Procédures civiles d'exécution