Bibliothèque de sciences criminelles - Tome 65 - Le discernement en droit pénal - 292

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LE DISCERNEMENT EN DROIT PÉNAL

797. La succession d'infractions est plus patente encore lorsque le contenu
du discernement subit une modification. En effet dans ce cas, la modification du
texte contraventionnel donne naissance à un discernement renouvelé, tant et si bien
que le contrevenant peut être condamné pour la même omission, le même comportement négatif continué, mais qui s'avère juridiquement distinct de la conscience d'être
assujetti à une obligation dont le contenu a changé.
798. Dans l'arrêt rendu le 2 octobre 2007 par la Chambre criminelle222, une
personne morale poursuit l'exploitation d'un site classé malgré la mise en demeure
de mise en conformité de l'installation. Condamnée une première fois sur le fondement d'un arrêté du 16 juillet 1999, elle est condamnée à nouveau sur le fondement
de l'arrêté du 11 février 2003 par la Cour d'appel de Rennes le 1er février 2007,
toujours pour infraction à la législation sur les installations classées. Elle conteste le
principe de sa seconde condamnation en invoquant une violation de la règle non bis
in idem prévue à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Son
pourvoi devant la Chambre criminelle est rejeté le 2 octobre 2007. L'argumentation
des juges du fond et du requérant se fondait tous deux sur le caractère continu de
l'infraction prévue à l'article L 714-11 du Code de l'environnement.
799. La question posée à la Cour de cassation était la suivante : la modification
du fondement textuel ayant justifié la condamnation d'un contrevenant autorise-telle d'engager de nouvelles poursuites contre lui à partir d'une mise en demeure ?
La Chambre criminelle répond comme à son habitude que, « dès lors que la seule
constatation de la violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou
réglementaire implique, de la part de son auteur, l'intention coupable exigée par l'article 121-3, alinéa 1er, du code pénal, la cour d'appel qui n'a pas méconnu le principe
non bis in idem ». Le discernement ayant servi de support à la volonté coupable
initiale a été modifié, si bien que le non-respect de la mise en demeure constitue une
infraction distincte de celle pour laquelle la personne a déjà été condamnée.
B. LES INFRACTIONS SUCCESSIVES
EN PRÉSENCE D'OBLIGATIONS GÉNÉRALES
800. Parce que l'infraction est de nature intellectuelle, la constatation d'un
dommage constitue une preuve de l'existence antérieure de cette infraction. Il faut
en tirer deux conséquences. La première veut que la consolidation finale d'un
dommage matériel ne fixe pas l'étendue de l'intention. Une personne peut avoir
voulu commettre un résultat précis, sans en désirer les suites. Son fait intentionnel
sera qualifié au vu de ses qualités personnelles ; puis une autre infraction peut
naître chez la personne qui prend consécutivement conscience qu'elle relève d'un
nouveau statut juridique.
801. Aussi, et c'est là la seconde conséquence, il est possible d'envisager la qualification d'un fait postérieur de non-assistance à personne en péril successivement
de venir en aide à son agresseur. Pourtant au vu des faits de l'espèce, il ne s'agissait pas d'une victime
d'agression soumise à l'obligation d'assister son agresseur, mais d'un individu ayant volontairement
décidé à « régler son compte » à l'assaillant d'un individu pris dans une rixe avec l'un de ses amis.
L'agresseur est d'abord frappé par la victime qui prend aussitôt la fuite, puis il n'entreprend pas de
porter assistance à la personne qu'il poursuivait alors même qu'il avait compris qu'elle était tombée à
l'eau, de nuit et dans une zone éloignée des habitations, par accident et sous la crainte d'être rattrapée.
La conviction de la nécessité d'assistance fondait l'imputation de cette infraction intentionnelle.
222. Crim., 2 octobre 2007, inédit, n° de pourvoi : 07-81194.

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