Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 13 - La prévention des difficultés des entreprises dans l'AUPC révisé - 320

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LA PRÉVENTION DES DIFFICULTÉS DES ENTREPRISES DANS L'AUPC RÉVISÉ

694. L'adéquation de l'infrastructure judiciaire, s'agissant surtout des ressources dont disposent les tribunaux en matière de procédures préventives, aura
certainement une influence déterminante sur l'efficacité et la rapidité avec lesquelles seront traitées ces procédures75. Il ne suffit pas seulement pour les États de
mettre en place des mécanismes juridiques visant à garantir la bonne fin des procédures ; ils devraient aussi s'assurer que dans les faits, les magistrats du parquet
sont par exemple en mesure d'intervenir promptement dans les procédures préventives. En effet, à l'heure actuelle, le ratio entre le renforcement de leurs prérogatives légales en matière de prévention des difficultés des entreprises et leurs
capacités concrètes à pouvoir les mettre en œuvre, n'est pas très satisfaisant dans
la grande majorité des États concernés76. Plus concrètement, si les magistrats du
parquet n'ont pas suffisamment de temps pour exploiter les documents à eux
remis à l'occasion d'une demande de résolution d'un concordat préventif, alors
que la décision de la juridiction compétente est subordonnée à leur avis, il est à
craindre qu'ils apposeront simplement sur le dossier la mention « vu et s'en rapporte »77. Comment les parquets pourront-ils garder un œil sur le travail et la
rémunération des mandataires judiciaires désignés dans les procédures ouvertes
sur leur ressort territorial s'ils sont déjà submergés par les affaires pénales78 ? Leur
implication risque très souvent d'être dictée par des considérations d'ordre économique comme le poids de l'entreprise dans la région où elle est implantée, le
nombre de salariés, etc.
695. Ainsi donc, le régime de la prévention ne produira l'effet voulu, à savoir la
sauvegarde des entreprises viables, que si les juridictions nationales et les agents
chargés de l'exécuter ont les moyens nécessaires pour assurer aux bénéficiaires
dudit régime le maximum de rapidité, d'équité et d'efficacité. Passée l'étape de l'application interprétative de la loi, le constat de l'alourdissement des prérogatives
commerciales du parquet, de l'augmentation de la charge de travail des greffiers et
des juges, devraient encourager les États parties soit à titre individuel soit de manière
concertée au sein de l'Organisation, à prendre des mesures d'accompagnement de
l'AUPC révisé. Il serait par exemple souhaitable qu'une restructuration ou un renforcement des effectifs des tribunaux accompagne la réforme dans les États où ce
besoin s'impose et où les précédentes réformes faites par l'OHADA n'avaient pas
conduit à repenser l'organisation judiciaire. Il conviendrait par exemple que chaque
75. Guide législatif de la CNUDCI sur le droit de l'insolvabilité, op. cit.,p. 39.
76. « La force, la qualité et la dimension d'intervention d'un parquet dépend étroitement de ses
moyens opérationnels. "Stocker et empiler" des prérogatives légales si elles ne peuvent être déployées
notamment au moment utile n'est pas pour le praticien, très satisfaisant et se double d'ailleurs d'un
sentiment de frustration comme peut l'avoir celui à qui on donne un bel outil mais qui le sort peu de sa
vitrine ne disposant pas du temps suffisant pour l'utiliser au rythme souhaitable ». Triaulaire J.-P.., « Le
rôle du ministère public », Rev. proc. coll., 2006, n° 2, p. 215.
77. Il adviendra sans doute bientôt que le parquet d'une juridiction nationale manque de donner
son avis sur une question où cet avis est requis. Il reviendra alors à la jurisprudence de dire si cet avis
est requis ou non à peine de nullité.
78. AUPC révisé, art. 4-8 : « Le débiteur et les créanciers, dans toute procédure collective, peuvent
communiquer à l'autorité ou à la juridiction compétente ou au ministère public de l'État partie concerné
tout document ou information susceptible de conduire à l'ouverture de poursuites disciplinaires à
l'encontre d'un mandataire judiciaire ».
Aux termes de l'article 4-21 de l'AUPC, les décisions de la juridiction compétente relatives à la
rémunération des mandataires sont susceptibles d'appel devant la juridiction compétente de l'État
partie dans les 15 jours de leur prononcé à la requête du débiteur, du mandataire judiciaire ou du
ministère public.

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