Droit des affaires - Assurance-vie, propriété et gestion d'actifs - 1re - 75

LA PRATIQUE : ENTRE LE POUVOIR ET LA PROPRIÉTÉ 75

délai de deux mois est contraignant pour l'assureur. Il doit pouvoir se libérer dans ce délai strict.
La valorisation peut également être génératrice de conflits d'intérêts. En
cas de décès de la personne assurée, les prestations bénéficiaires en faveur
du tiers désigné sont taxables soit sur base du prélèvement de l'article 990 I
du Code général des impôts, soit sur base des droits de mutation à titre
gratuit (article 757 B du même code). Or, dans le cas d'une valorisation
en désaccord avec la valeur de marché, tant l'administration fiscale (pour
cause de base taxable erronée) que le bénéficiaire (pour cause de sous-valorisation) pourraient s'estimer lésés.
En cas de rachat, il existe une problématique fiscale comparable (article 125-0 A du Code général des impôts) ; mais surtout, le calcul des frais
administratifs et financiers du contrat est effectué sur une base fictive
(celle de la dernière valeur liquidative de l'actif) et vraisemblablement
trop importante.
Faisant suite à l'affaire Bernard Madoff, un arrêt de la Cour de cassation du
4 juillet 201362 s'est prononcé sur la question d'une « disparition » de
l'unité de compte lorsque sa cotation était suspendue.
« En l'espèce, les souscripteurs de contrats d'assurance-vie en unités de
compte avaient choisi d'investir les primes dans les titres de société d'une
SICAV de droit luxembourgeois (Luxalpha), laquelle avait confié la totalité
de ses actifs à une société de Bernard Madoff. À la suite de la révélation des
fraudes commises au sein de cette société, le cours des titres fut suspendu,
son agrément retiré, puis sa liquidation judiciaire prononcée, sans être clôturée lors de l'introduction de l'instance. Les souscripteurs avaient assigné
l'assureur pour obtenir sa condamnation à leur verser un montant égal à la
valeur liquidative des unités de compte substituées, évaluées lors de la publication de leur dernière évaluation, ce à quoi se refusait l'assureur »63.
L'article L. 131-1, dernier alinéa, du Code des assurances, dans sa rédaction
applicable au litige, énonce qu'en matière d'assurance sur la vie en unités
de compte, le contrat devait prévoir les modalités selon lesquelles, en cas de
disparition d'une unité de compte, une autre unité de compte lui est substituée, par avenant au contrat. L'ambition des souscripteurs était d'échapper aux conséquences négatives liées à l'indisponibilité de la valeur nette
d'inventaire du titre Luxalpha et la matérialisation de cette impossibilité
par l'absence de contrepartie en numéraire lors d'une opération sur le
contrat.
62. Cass. 2e civ., 4 juillet 2013, nº 12-21842, P+B, JurisData nº 2013-013883, voir Annexe 2.
63. Commentaire de l'arrêt, Jean BIGOT, RGDA 2013, nº 4, p. 967.

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