Contextes - Littératures populaires du droit - 60

LITTÉrATureS POPuLAIreS Du DrOIT

Ce n'était donc pas, d'une part, le premier Code civil à entrer en vigueur
dans cette partie d'Italie et, d'autre part, le gouvernement autrichien n'instaurait pas un régime libéral en Lombardie-Vénétie, bien au contraire.
Pourtant, les littératures populaires du droit commencèrent à apparaître
par rapport à la codification autrichienne et cela notamment à Milan, dans
une ville qui était devenue un pôle d'attraction culturelle grâce au développement d'un florissant marché des librairies.
D'après Marino Berengo, qui a dédié au sujet des études fondamentales,
cela fut le résultat de la politique culturelle de Napoléon, promouvant
l'industrie typographique et de l'édition dans la capitale du royaume
d'Italie. Sous Bonaparte, Milan fut un centre important de publication et
de traduction des ouvrages françaises, où l'imprimerie se mettait aussi au
service de la nouvelle bureaucratie impériale. De plus, à la différence de
ce qui se passa ailleurs, ici la scolarisation élémentaire obligatoire imposée
par l'empereur avait donné ses fruits, préparant une génération de futurs
lecteurs27.
Avec l'arrivée des Autrichiens, la fortune des libraires milanais devait
continuer, bien que dans un contexte administratif et politique différent.
Paradoxalement, la tension entre les intellectuels et le pouvoir politique des
Habsbourg n'allait pas nuire au marché éditorial. Au contraire, la démobilisation de la très cultivée bureaucratie napoléonienne rendait disponible
pour les maisons d'édition et les librairies des gens de lettres sans emploi,
à la recherche d'un métier libre28.
Ainsi, pendant une quarantaine d'années, le marché du livre milanais
vivait une période heureuse : on assistait à la naissance d'un nouveau protagoniste du marché éditorial, l'éditeur, prenant le pas, dans la pratique, sur
les libraires et les imprimeurs, les seuls professionnels traditionnellement
reconnus et réglementés par la loi. Ce ne fut qu'après 1848 que la situation devait sensiblement changer, à la suite des effets de la reconnaissance
juridique du droit d'auteur par une convention entre les gouvernements
des États italiens en 184029 et, surtout, suite à la répression autrichienne
des révoltes de 1848 dans le Milanais.
Cependant, malgré le fait que le marché éditorial n'était plus en pleine
floraison, ce fut justement en 1857 que les frères Manini, éditeurs, typographes et libraires à Milan depuis 181930, proposèrent dans leur catalogue
27. M. Berengo, Intellettuali e librai nella Milano della Restaurazione, Torino, 1980,
p. 3-8.
28. Ibidem, p. 49 et s.
29. Ibidem, p. 257-308. V. aussi M. Borghi, La manifattura del pensiero. Diritti d'autore
e mercato delle lettere in Italia (1801-1865), Milano, 2003.
30. P. Caccia, « Manini », in Editori italiani dell'Ottocento : repertorio, A. Gigli
Marchetti... [et al.] (dir.), t. I, Milano, 2004, p. 639-640.

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