Hors Collection - Le droit français de la concurrence. 30 ans après l'ordonnance du 1er décembre 1986 - 2017-2018 - 160

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PROPOS INTRODUCTIFS

Je fus servi par un événements imprévu : la publication, en 1962, des avis
que la Commission technique des ententes avait rendus depuis 1953. Ces
avis étaient restés confidentiels pendant presque dix ans, car le ministre de
l'Économie de l'époque, M. Pinay, avait interdit qu'on les publiât ! C'est
dire l'esprit de l'époque. Mais le nouveau ministre, M. Giscard d'Estaing,
permit leur publication au journal officiel. En un seul numéro parurent les
vingt avis rendus entre 1954 et 1959, puis dans d'autres numéros entre 1959
et 1962.
Ce fut une révélation, car on découvrait en France une façon entièrement
nouvelle d'aborder les questions de concurrence.
La Commission technique des ententes n'avait qu'une compétence
limitée : elle rendait des avis qui étaient transmis au ministre de l'Économie.
Le ministre, qui en 1953 avait perdu ses pouvoirs de sanction des pratiques
de prix illicites, disposait seulement de l'opportunité des poursuites. Il
pouvait, s'il le jugeait utile, transmettre le dossier au Parquet, aux fins de
poursuites pénales contre les responsables d'ententes prohibées. En fait,
la Commission technique des ententes demandait rarement au ministre
d'entamer des poursuites pénales et préférait recommander des mesures
propres à rétablir le jeu de la concurrence. C'était déjà la politique des
engagements. On observait d'ailleurs que le ministre se rangeait presque
systématiquement aux avis de la Commission. Les sanctions pénales étaient
exceptionnelles.
Deux autres traits singularisaient la Commission des ententes. En premier
lieu sa composition : 14 membres, dont 5 magistrats issus de la Cour de
cassation, du Conseil d'État, de la Cour des comptes et d'autres juridictions, 6 choisis en raison de leur compétence professionnelle et 2 membres
choisis en raison de leur compétence économique. Des rapporteurs à plein
temps et un rapporteur général. Observons que la composition de l'Autorité de la concurrence n'est pas fondamentalement différente, bien que son
domaine d'intervention et ses pouvoirs n'aient plus grand chose à voir avec
ceux de l'ancienne Commission technique des ententes. Cette pérennité
montre l'efficacité de la formule. J'ai personnellement pu constater, lors
de mon passage au Conseil de la concurrence, l'utilité des échanges et
parfois des oppositions, entre magistrats, professionnels et spécialistes de
l'économie et du droit de la concurrence.
En second lieu, la Commission des ententes se singularisait par sa façon
de traiter les affaires dont elle était saisie. Malgré leur brièveté, les premiers

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