Droit et Société - L'État du droit administratif - 2e - 254

L'ETAT DU DROIT ADMINISTRATIF

pelle la gouvernementalité 3. La notion permet d'identifier des techniques de
direction des conduites sociales- elles sont plus ou moins nouvelles selon les
cas - qui s'inventent dans l'exercice même du pouvoir. Que celui-ci
s'accomplisse précisément dans la mise en œuvre de la fonction administrative,
ou, plus largement, dans le pilotage de l'action publique.
Les exemples retenus ici, parmi d'autres possibles 4, pour illustrer cette problématique seront peut être perçus comme autant d'objets singuliers dont le regroupement ne pourrait qu'être fortuit. Disparates, ils le sont effectivement,
mais comme autant de pièces distinctes d'une même machine vouée à la production-reproduction de la légitimité. L'unité de la fonction régulatrice du droit
administratif se construit jusque dans la diversité de ces objets juridiques. Avec
ou par eux, les tensions, désaccords, et disputes qu'entretient l'action publique
deviennent, on l'a dit, autant de ressources démocratiques. Tout dépend en
l'occurrence des modes de traitement de la conflictualité. En investissant cette
scène, même s'il le fait faiblement et avec retenue, le droit administratif lui assure comme un statut, tout en étendant son propre pouvoir de régulation des
échanges sociaux, qu'ils demeurent dans le cadre de l'administration publique,
ou qu'ils se déploient dans celui de l'action publique.
On a fait le choix de vérifier cette hypothèse à travers trois exemples. Le
premier nous fait entrer, par les moyens du droit, dans le système plutôt mal
connu du traitement des conflits internes à l'administration 5 (Section 1). Avec
le second on voit quels moyens le droit administratif met en œuvre à son tour
pour faire entrer l'évaluation des politiques publiques dans le champ de la juridicité 6(Section 2). Quant au dernier, il décrit l'outillage juridique de la participation du public aux affaires communales 7 (Section 3). Voilà trois situations
qui, chacune à sa manière, montrent comment le droit administratif se trouve
impliqué dans ces mouvements multiples qui font bouger jusqu'à la notion de
démocratie. Ce droit-là n'est évidemment plus réductible à ce qu'a pu être sa
matière primitive : le contentieux dont les juridictions, seules, sont en charge. A
la doctrine d'en tirer les enseignements méthodologiques qui s'imposent : il lui
revient d'écrire ce droit administratif moins tributaire du juge, mais plus dépendant des pratiques de l'action publique.
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L'auteur s'est expliqué sur cette notion dans Sécurité, territoire, population, cours au Collège
de France 1977-1978, Gallimard/Seuil, coll. « Hautes études », Paris, 2004, et, Naissance de
la biopolitique, cours au Collège de France 1978-1979, Gallimard/Seuil, coll. « Hautes
études », Paris, 2004.
On pense aux transformations de la relation administrations-administrés qui résultent de
l'informatisation des rapports sociaux.
Cette section reprend le texte d'une étude parue dans l'AJDA 2003, p. 800 et s. sous le titre
Sur les modes de règlement non juridictionnels des conflits internes à l'administration. Elle
est reproduite avec l'aimable autorisation des Editions Dalloz.
Je reviens en l'occurrence sur un travail intitulé Droit et évaluation ? donné à la Revue française des affaires sociales, n° 1-2 janvier-juin 2010, p. 353-367.
Une version première des développements qu'on va lire figure sous le titre Quelle(s) participation(s) aux affaires communales ? Eléments de réponse du droit français, dans la revue
Pouvoirs, n° 95/2000, p. 117-132.

DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 56, 2e éd., 2017

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