Les Intégrales - Volume 20 - Droit de la communication audiovisuelle - 1re - 112

DROIT DE LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE

l'accès de leurs abonnés à certains services ou à certaines applications, notamment en
dégradant la qualité des communications ou en limitant la bande passante allouée à ces
services. Il correspond à un objectif de non-discrimination dans l'acheminement du trafic
sur le réseau internet ouvert au public145.
La neutralité des réseaux, qui peut être vue comme un corollaire technique nécessaire à
la liberté d'expression, ne saurait être absolue. En effet, si certaines mesures de restrictions de trafic sont difficilement justifiables (notamment celles liées à l'exclusion de
concurrents ou liées à des exigences de rémunération formulées des opérateurs),
d'autres peuvent être imposées par les opérateurs pour des raisons légitimes, comme
éviter les congestions de réseaux ou permettre la bonne diffusion des services dits
« gérés » comme le téléphone ou les services de télévision par internet (les bouquets
proposés par les opérateurs). De telles mesures peuvent également être exigées pour des
raisons d'ordre public, liées à la lutte contre les contenus illicites.
153 Reconnaissance et contenu du principe. L'Arcep avait formulé en 2010 des recommandations aux opérateurs sur la neutralité des réseaux, mais celles-ci étaient non
contraignantes. L'ordonnance nº 2011-1012 du 24 août 2011 avait ajouté à liste des
objectifs de la régulation, fixée par l'article L. 32-1 du Code des postes et des communications électroniques, ceux de veiller « à l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans les relations entre opérateurs et fournisseurs de services de
communications au public en ligne pour l'acheminement du trafic et l'accès à ces
services » et de « favoriser la capacité des utilisateurs finals à accéder à l'information et
à en diffuser ainsi qu'à accéder aux applications et services de leur choix ». Ce texte
consacrait ainsi partiellement le principe de neutralité du net. Le principe a par la suite
été consacré au niveau européen par le règlement (UE) 2015/2120 du 25 novembre
2015 établissant des mesures relatives à l'accès à un internet ouvert146, complété par
des lignes directrices adoptées par l'organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) en 2016, révisées en juin 2020147.

Ces textes interdisent aux fournisseurs d'accès à internet de bloquer ou de ralentir le
trafic internet, sauf lorsqu'ils doivent se conformer à des actes législatifs de l'Union, à la
législation nationale ou aux décisions d'une juridiction ou d'une autorité investie des
pouvoirs nécessaires, pour préserver l'intégrité ou la sécurité du réseau, ou pour éviter la
congestion imminente de celui-ci, et à la condition que les catégories équivalentes de
trafic reçoivent un traitement égal. Ces exceptions sont par ailleurs encadrées par un
principe de proportionnalité.
Le règlement consacre également le droit des utilisateurs « d'accéder aux informations et
aux contenus et de les diffuser, et d'utiliser et de fournir des applications et des services
de leur choix »148.
(145) Pour l'Arcep, « selon le principe de neutralité, chaque utilisateur doit avoir accès, à travers l'internet et, plus généralement, les réseaux de communications électroniques (quel que soit le support de diffusion), à l'ensemble des
contenus, services et applications véhiculés sur ces mêmes réseaux, quelle que soit la personne qui les délivre ou
les utilise, de façon transparente et non discriminatoire » (Arcep, « Neutralité de l'internet et des réseaux : propositions et recommandation », sept. 2010, p. 7).
(146) JO L 310, 26 nov. 2015, p. 1-18.
(147) Guidelines on the Implementation of the Open Internet Regulation, 11 juin 2020. V. également ORECE, avis du
6 déc. 2018 sur l'évaluation de l'application du règlement et des lignes directrices sur la neutralité du net, BoR
(18) 244.
(148) Droit des utilisateurs (art. 3.1 du règlement) : « Les utilisateurs finals ont le droit d'accéder aux informations et aux
contenus et de les diffuser, d'utiliser et de fournir des applications et des services et d'utiliser les équipements
terminaux de leur choix, quel que soit le lieu où se trouve l'utilisateur final ou le fournisseur, et quels que soient le
lieu, l'origine ou la destination de l'information, du contenu, de l'application ou du service, par l'intermédiaire de
leur service d'accès à l'internet.
Le présent paragraphe s'entend sans préjudice du droit de l'Union ou du droit national qui est conforme au droit de
l'Union, en ce qui concerne la légalité des contenus, des applications et des services. »

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