Systèmes - Dynamiques du droit de l'urbanisme - 1re - 34

Dynamiques du droit de l'urbanisme

présentent « un intérêt du point de vue de l'histoire, de l'art ou de
l'archéologie », par leur classement assorti d'un régime spécial de police
administrative comportant interdiction de détruire et accord ministériel
pour les modifier.
L'adoption de la loi de 1887 est difficile, comme l'avait été, en son temps,
celle de 1850. Émile Combes, alors sénateur, déclare en 1886 : « Exproprier,
soit, mais quand on exproprie, on paye, et vous, vous ne payez pas ».
Ferdinand Duval, ancien préfet de la Seine et conseiller municipal ajoute :
« Servitude prononcée dans l'intérêt public ? Mais l'intérêt artistique et
archéologique n'est pas un intérêt public ». La conciliation des droits et
intérêts contradictoires à laquelle procède la législation des monuments
historique est ainsi présentée par Théodore Reinach, rapporteur à
l'Assemblée nationale du projet ayant abouti à la loi de 1913 : « C'est au
contraire ce droit de propriété qu'on se propose de sauvegarder pour
l'avenir, tout en assurant l'espèce de droit de copropriété idéale que la
nation tout entière exerce sur les monuments classés où se reflète un
moment important de son génie ou de son histoire »24.
La législation des monuments historiques, reprise dans l'actuel Code du
patrimoine, est demeurée distincte de la législation de l'urbanisme, même si
le lien entre les deux est manifeste. L'article 11 de la loi de 1913 prévoit ainsi
qu'« aucun immeuble classé ou proposé pour le classement ne peut être
compris dans une enquête aux fins d'expropriation pour cause d'utilité
publique qu'après que le ministre chargé des affaires culturelles aura été
appelé à présenter ses observations ». Son impact sur l'urbanisme sera
amplifié par la « protection des abords », instituée par la loi du
25 février 1943, ajoutant un article 13bis à la loi de 1913. Ce sont désormais
les travaux sur les immeubles situés dans le champ de visibilité d'un édifice
classé ou inscrit qui sont soumis à une autorisation préalable au titre de la
législation des monuments historiques. La loi de 1943 prévoit d'emblée que
le permis de construire « tient lieu » de l'autorisation ainsi prévue « s'il est
revêtu du visa de l'architecte des Bâtiments de France ». C'est une première
illustration de la coordination des polices administratives qui ne cessera de
se développer (immeuble de grande hauteur ou établissement recevant du
public au titre de la législation de la construction et de l'habitation,
aménagement commercial au titre du Code de commerce, etc.).
La protection des « perspectives monumentales » a par ailleurs pénétré
ce qui est sur le point de devenir le droit de l'urbanisme, par un détour
inattendu, que l'on qualifierait aujourd'hui de « cavalier » : la loi de finances
du 31 juillet 1911. Son article 118 vient modifier l'article 4 du décret de 1852,
pour permettre à l'administration de contrôler « la conservation des
24. Rapport du 11 avr. 1911 fait au nom de la Commission de l'enseignement et des beauxarts chargée d'examiner le projet de loi relatif à la conservation des monuments et objets
ayant un intérêt historique ou artistique, par Théodore Reinach (1860-1928), député de la
Savoie de 1906 à 1914.

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