Droit et Économie - L'ordre public économique - 251

LA NOTION D'OPE EN DROIT INTERNATIONAL 251

interne puisqu'il s'agit des deux faces d'un même miroir. Il est pourtant des
domaines transversaux qui incitent à l'optimisme, et qui s'extériorisent,
non pas par une norme imposée « d'en haut » (Top down), mais par la
reprise volontaire de normes élaborées dans des cénacles multilatéraux
par les ordres internes des États (Bottom up). À cet égard, le droit fiscal
international connaît d'indéniables progrès, non pas en matière d'harmonisation fiscale au sens strict, mais en matière de coopération fiscale
internationale61. C'est le cas du secret bancaire où, sous l'impulsion du
G20, a été établie par l'OCDE une convention regroupant près d'une centaine d'États qui a instauré un Groupe d'examen de son suivi. De même, en
matière d'échange automatique de renseignements, l'OCDE a étendu ce
qui était à l'origine la législation unilatérale américaine FACTA (Foreign
Account Tax Compliance Act), ou encore des progrès significatifs (même si
lents) sont palpables pour les pratiques d'évitement fiscal via le BEPS
(pour Base Erosion and Profit Shifting, érosion des bases fiscales et transfert
des bénéfices) endossé par le G20 lors du sommet des 15 et 16 novembre
2015 à Antalya en Turquie. La France et États-Unis ont déjà incorporé une
bonne partie des mesures des quinze actions de ce texte, même s'il encore
trop tôt pour parler de régulation fiscale internationale. Le procédé « Bottom up » est également à l'œuvre en matière de concurrence. Alors qu'il y a
quinze ans était envisagé un chapitre « concurrence » dans le traité OMC
discuté lors de la conférence de Singapour, l'option a finalement été abandonnée à Cancun en 2003 en raison de l'opposition des États-Unis et de
celle des pays émergents62. On a alors préféré une convergence par les
autorités de la concurrence (130 aujourd'hui), sorte de « club » informel
des autorités. Comme le remarque Bruno Lasserre, à la création d'un
« ordre mondial de la concurrence », on a donc préféré « la mise en convergence en réseau des autorités de la concurrence »63.
Il en résulte que s'il n'y a nulle trace de ce qui pourrait ressembler à un
véritable ordre public économique international centralisé, des éléments
s'emboîtent et se mettent en place. De plus, nous avons bien senti que les
deux sphères interne et internationale ne sont pas étanches et qu'il existe
des formes de structuration, y compris insidieuses, à condition que les mots
« ordre - public - économique » prennent un sens quelque peu différent,
notamment l'adjectif « public ».
61. Sur cet aspect, v. P. SAINT-AMANS : « La fiscalité internationale », in G. GUILLAUME (dir.), La vie
internationale et le droit, op. cit., p. 281 et s.
62. On peut néanmoins envisager également l'existence d'un droit de la concurrence international à travers l'application des principes de l'OMC qui empêchent les entraves à la concurrence, même si le mot lui-même n'est pas prononcé.
63. Dans « Le droit international de la concurrence », ibid., p. 269 et s.

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