Bibliothèque de droit public - Tome 300 - Nationaux et étrangers en droit public français - 187

UNE DÉTERMINATION HÉSITANTE DES CRITÈRES DE LA NATIONALITÉ

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cas exceptionnel du terrorisme mais que les nationaux étant tous liés à l'État de la
même façon, la gravité de l'acte est identique dans les deux cas et par conséquent
que la déchéance de nationalité doit valoir pour tous les nationaux.
Malgré ces objections, cette position du Conseil a été confirmée par la décision du 23 janvier 2015 rendue sur question prioritaire de constitutionnalité83.
2. Une position confirmée par la décision du 23 janvier 2015
250. Saisi de la constitutionnalité des termes « ou pour un crime ou un délit
constituant un acte de terrorisme » de l'article 25 du Code civil, le Conseil commence par reprendre l'énoncé de la règle générale relative au principe d'égalité et
en fait application à la procédure de déchéance de nationalité en faisant référence
à sa décision de 199684. Il y ajoute cependant deux considérations : la première
concerne le délai relatif à la date de perpétration des actes de terrorisme et la
seconde concernant le délai pendant lequel la mesure de déchéance de nationalité
peut être prise, ces deux délais ayant été allongés par la loi depuis sa précédente
décision. Trois éléments ont ainsi été modifiés par combinaison des lois de
2003 et 2006 : le délai concernant la date à laquelle les actes doivent être commis85,
le délai dans lequel la mesure de déchéance peut être prise à compter de la Commission des actes86 et enfin la possibilité de fonder la déchéance de nationalité sur
des actes commis avant l'acquisition de la nationalité française87.
Le délai imposé au gouvernement pour prendre la mesure de déchéance a été
porté de dix à quinze ans à partir de la date des faits par la loi du 23 janvier 200688. Le
Conseil, s'il signale cet allongement89, considère qu'il ne porte pas une atteinte disproportionnée au principe d'égalité. En revanche, dans le même considérant, il estime
que constituerait une telle atteinte le fait d'allonger davantage le délai à compter de
l'acquisition de la nationalité française pendant lequel les faits de terrorisme reprochés à l'intéressé doivent s'être produits pour autoriser la mesure de déchéance90. La
combinaison de ces deux délais, validés par le Conseil, peut pourtant entraîner une
83. Cons. const., n° 2014-439 QPC du 23 janv. 2015, AJDA 2015, p. 134 ; ibid., p. 1000, note
b. pauvert ; D. 2015. 208 ; AJ pénal 2015, p. 201, obs. c. chassang ; Rev. crit. DIP 2015, p. 115, note
p. lagarde.
84. Avant d'opérer le contrôle sur le fond, le Conseil a tout d'abord traité de la recevabilité de la
question. Afin de juger recevable la question prioritaire de constitutionalité alors même qu'il s'était déjà
prononcé sur ce même sujet en 1996, il s'est fondé sur son interprétation de l'article 23-2 de l'Ordonnance
n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel qui dispose que,
pour être transmise et renvoyée, une question prioritaire de constitutionnalité doit porter sur une
disposition législative qui n'a pas été déclarée conforme à la Constitution « dans les motifs et le dispositif
d'une décision du Conseil constitutionnel ». Ce dernier ayant fait une interprétation littérale de ce texte
dans sa jurisprudence du 17 mars 2011 (Cons. const., n° 2010-104 QPC du 17 mars 2011, Constitutions,
2011, p. 377, obs. a. barilari), il a estimé en l'espèce que rien ne s'opposait à un examen de la disposition
contestée dans la mesure où celle-ci n'a pas été déclarée « conforme à la Constitution dans le dispositif
de sa décision » de 1996 (cons. 5).
85. Loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions
diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, JO n° 0020 du 24 janv. 2006, p. 1129.
86. Loi n° 2006-64 du 23 janv. 2006, précitée.
87. Loi  n°  2003-1119 du 26  nov.  2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des
étrangers en france et à la nationalité, JO n° 274 du 27 nov. 2003, p. 20136.
88. Loi n° 2006-64 du 23 janv. 2006, précitée.
89. Cons. 15 de la décision.
90. Cons. 15 de la décision : « [...] ce délai de quinze ans prévu au premier alinéa de l'article 25-1,
qui ne saurait être allongé sans porter une atteinte disproportionnée à l'égalité entre les personnes ayant
acquis la nationalité française et celles auxquelles la nationalité française a été attribuée à leur naissance ».
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