Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 63 - La transparence dans le droit budgétaire de l'État en France - 149

L'APPROCHE CLASSIQUE DE LA TRANSPARENCE : UNE FINALITÉ POLITIQUE

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l'opacité et les malversations financières. La déclaration royale du 17 octobre 1779
regrette ainsi que « tous les registres et les comptes du Trésor royal, où l'on devrait
naturellement trouver le détail exact de l'universalité de nos recettes et de nos dépenses,
ne présentent à cet égard que des connaissances insuffisantes et des renseignements
incomplets »99. Le compte rendu de Necker, malgré la volonté de publicité dont il se
fait l'écho, n'est pas exempt de critiques sous l'angle de l'universalité100.
Ni le consulat ni l'Empire ne mettront en place l'universalité budgétaire. La
pratique des produits nets y constitue la règle.
300. Sous la Restauration, la conceptualisation du principe d'universalité
budgétaire est des plus passionnément menées. Elle s'oppose au départ à la
volonté d'indépendance des puissantes régies financières du xixe siècle qui ont
pris l'habitude de ne jamais faire figurer leurs frais de gestion au budget de
l'État. Elles les déduisent directement des recettes qu'elles perçoivent, créant ainsi
une situation de contraction. Seuls des produits nets sont ainsi soumis au regard
des parlementaires.
La législation va cependant évoluer dans un sens plus favorable à l'universalité. La loi du 25 mars 1817 oblige d'inscrire toutes les non-valeurs dans le budget
de l'État dans lequel elles n'ont auparavant jamais été retracées. On doit à la loi
de finances du 15 mai 1818 d'avoir, pour la première fois, fait figurer dans le projet de loi de finances, l'ensemble des recettes fiscales. Elle supprime ainsi la
contraction qui existait jusque-là et qui ne renseignait pas sur les frais de gestion
de l'impôt. Ces derniers sont également inscrits au budget. En 1820, le produit des
amendes et confiscations légales, de l'enregistrement, des douanes et des contributions indirectes est rattaché au budget soit deux ans avant le rattachement des
remboursements et restitutions, intervenu en 1822101. Le marquis de Garnier proteste. « Les frais de régie, soutient-il, les non-valeurs et les restitutions ne peuvent
entrer dans la loi de finances, sans jeter le désordre et la confusion dans la comptabilité. En outre, cette forme tend à déplacer la responsabilité ministérielle et à faire
dans la main des Chambres une portion importante de la puissance exécutive. »102.
Ces protestations ne sont pas suivies d'effet. L'ordonnance du 14 septembre 1822
va même renforcer l'universalité par son article 3 qui fait défense aux ministres
d'augmenter leur crédit par quelque ressource que ce soit. Toutes les ressources
doivent donc être inscrites dans la loi de finances. Le principe est repris par l'ordonnance du 31 mai 1838 portant règlement général sur la comptabilité publique.
L'ordonnance organique du 2 janvier 1959 le pose en son article 18 alinéa 1er qui
dispose qu'« il est fait recette du montant intégral des produits, sans contraction
entre les recettes et les dépenses. »
99. Cité par Marcel MARION, Histoire financière de la France depuis 1715, t. 1, 1715-1789,
Paris, Librairie Arthur Rousseau, Rousseau et Cie Éditeurs, 1914, p. 451.
100. « Si Necker avait voulu éclairer la nation, et non l'éblouir, une seule méthode eût été de mise :
énumérer l'universalité des recettes et des dépenses réelles (...) afférentes à l'année qui venait de s'écouler,
ou à celle qui venait de s'ouvrir ; mais un état semblable, idée juste de la réalité budgétaire, était sans
doute au-dessus des forces des ministres de l'ancien régime... ils n'ont donné que des comptes de caisses,
des états plus ou moins exacts, plus ou moins confus, des recettes et des dépenses effectuées ou à effectuer
dans le cours d'une année déterminée, mais non des ressources et des charges normales d'un exercice. »,
Marcel MARION, Histoire financière de la France depuis 1715, t. 1, 1715-1789, op. cit., p. 332-333.
101. Paul BOITEAU, Fortune publique et finances de la France, publiée en 1866 par la Librairie
Guillaumin et Cie, p. 229.
102. Jean-Emmanuel BESSON, Le contrôle des budgets en France et à l'étranger, op. cit., p. 319.

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