Systèmes - La conduite du changement climatique : entre contraintes et incitations - 1re - 25

La protection internationale de l'environnement : d'une obligation à une valeur

Dans cette perspective, les accords internationaux conclus par
l'Union, en leur qualité de droit de l'Union, sont invocables devant les
juridictions nationales. En l'occurrence, le juge national est invité à
donner plein effet au principe de primauté en interprétant le droit
national à l'aune de l'accord international. Ainsi, sans appliquer
stricto sensu l'engagement international conclu par l'Union, par le
biais de l'interprétation il peut moduler la mise en œuvre du droit
national, neutraliser les dispositions incompatibles et, éventuellement,
contraindre l'État à réparer les dommages causés pour violation du
droit de l'Union29. L'invocabilité des accords internationaux, en leur
qualité de droit de l'Union, aux fins d'interprétation conforme du droit
national permet ainsi de pallier l'absence d'effet direct de leurs
dispositions et de remédier à cette « défaillance congénitale »
d'imprécision technique et de conditionnalité fréquemment constatée
en matière environnementale. L'invocabilité d'interprétation conforme,
dérivée du principe de primauté, permet ainsi aux justiciables de
saisir le juge national afin qu'il puisse contribuer à la mise en œuvre
effective des objectifs de protection environnementale intégrés dans le
droit international à défaut de pouvoir en appliquer directement les
dispositions. L'effectivité de mise en œuvre des normes internationales
protectrices de l'environnement peut également résulter d'un constat
de manquement d'un État membre au respect de ses obligations
« communautaires ». Tel fut notamment le cas lorsque la
Commission européenne a intenté un recours en manquement
contre la France afin de faire constater par la CJCE que cet État
membre n'avait pas effectué le nombre annuel d'inspections requis
par la directive 95/21/CE30. Celle-ci visait notamment à appliquer les
normes internationales relatives à la sécurité maritime, à la
prévention de la pollution. À cet égard, tant les dispositions de la
directive que l'arrêt de la Cour31 attestent de l'effet démultiplicateur
du droit de l'Union quant à l'application effective du droit
international de l'environnement. En effet, dans l'exposé des motifs,
la directive précise que « la sécurité, la prévention de la pollution [...]
peuvent être efficacement améliorées par [...] une application stricte
des conventions, codes et résolutions internationaux [...] ; que [...] ces
normes internationales sont de moins en moins appliquées et mises en
œuvre par un nombre croissant des États du pavillon ; [...] qu'un cadre
29. Cf. SIMON D., « Invocabilité et primauté : petite expérience de déconstruction », in Union
européenne et droit international, dir. BENLOLO-CARABOT M., CANDAŞ U., CUJO E., Pedone, 2012,
p. 139-157.
30. Directive 95/21/CE du Conseil, du 19 juin 1995, JOCE nº L 157 du 7 juill. 1995 p. 1-19.
31. CJCE, 22 juin 2004, Commission c/France, aff. C-439/02 : ECLI:EU:C:2004:380.

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