Systèmes - La conduite du changement climatique : entre contraintes et incitations - 1re - 90

La conduite du changement climatique

et société civile discuter et négocier pour trouver une solution. Le
rôle des politiques se limite alors à optimiser le processus de
consultation et de négociation, conformément à une vision
néolibérale du rôle des pouvoirs publics et non à prendre parti et à
trancher. En cas d'échec des négociations, les politiques se
réservent la possibilité de blâmer l'intransigeance des ONG ou plus
rarement celle des entreprises, plutôt que d'admettre leur manque
de volonté politique. Les négociations de premier plan à échelle de la
société civile se déroulant en pleine lumière permettent ainsi de
masquer les calculs politiques moins avouables réalisés à l'ombre
des regards. Les ONG hésitent le plus souvent à dénoncer ce
partage des rôles avec les pouvoirs publics et les entreprises :
celles qui tentent de remettre en question cette configuration
imposée par le contexte institutionnel s'exposent au risque de
marginalisation et de tarissement des sources de financement
conventionnelles (pouvoirs publics, fondations d'entreprises...) mais
aussi des ressources sociales.
2. Des ONG sous-traitants des pouvoirs publics
Dans un contexte de restriction budgétaire et de rationalisation de
l'action publique, les pouvoirs publics préfèrent subventionner
l'action d'ONG réputées plus efficace et moins coûteuse que l'action
des administrations. La mise en concurrence des ONG les unes avec
les autres mais aussi avec des acteurs à but lucratif pour répondre à
des appels d'offres sur un quasi marché est supposée en théorie
permettre d'améliorer l'efficacité de l'action des ONG. Les enquêtes
empiriques font ressortir un processus d'isomorphisme institutionnel
homogénéisant les pratiques des ONG de défense de l'environnement
vers plus de professionnalisation et vers la défense de causes
semblables et surtout en adéquation avec les desiderata des
donateurs10, conformément à la théorie de la dépendance du sentier.
Dans un autre secteur que l'environnement, Hwang et Powell11
remarquent que la fiabilité et l'augmentation d'échelle se sont faites
au détriment de la capacité d'expérimentation et d'innovation de ces
organisations.
10. Pour Delfin et Tang, plus que le type de donateurs, c'est le type de financement (court
terme ou moyen terme) et la capacité des donateurs à contrôler effectivement
l'utilisation des fonds, qui semblent bien plus décisifs : DELFIN F. G., TANG S. Y.,
« Foundation Impact on Environmental Nongovernmental Organizations : The Grantees'
Perspective », Nonprofit and Voluntary Sector Quarterly, 2008, 37, p. 603-625.
11. HWANG K., POWELL W. W., « The Rationalization of Charity : The Influences of Professionalism
in the Nonprofit Sector », Administrative Science Quaterly, 2009, 54, p. 268-298.

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