Bibliothèque de droit privé - Tome 580 - La concurrence entre les sûretés - 295

SUBSTITUABILITÉ EXCEPTIONNELLE DES TECHNIQUES EN DROIT CIVIL

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exceptions n'est que temporaire pour le créancier, mais fait naître un risque pour
le débiteur qui supporte le risque d'insolvabilité du créancier29.
La garantie autonome est souvent présentée par comparaison avec le cautionnement. Dans cette présentation, l'originalité de la garantie autonome tient
essentiellement à l'inversion de la chronologie : le paiement précède la discussion.
Mais les conséquences vont bien au-delà, elles donnent à la garantie autonome
une véritable singularité qui la rend irréductible au cautionnement. Pour le garant
autonome et le débiteur, la souscription d'une garantie autonome se révèle beaucoup plus dangereuse que la souscription d'un cautionnement, de sorte qu'il est
impossible d'affirmer que ces mécanismes sont substituables.
2. Du point de vue du créancier
265. Les limites de l'équivalence quant à l'étendue des droits du créancier.
À première vue, l'affirmation d'une concurrence entre le cautionnement et la
garantie autonome est davantage conforme à la réalité lorsque l'on se place du
point de vue du créancier. En effet, l'une et l'autre de ces sûretés confèrent au
créancier un droit direct contre le garant personnel et la prestation promise par ce
dernier s'exécute directement dans son patrimoine. En outre, le créancier est soumis au risque d'insolvabilité du garant personnel, que la sûreté soit un cautionnement ou une garantie autonome. Enfin, la souscription d'une garantie autonome
revêt un intérêt majeur pour le créancier en raison de l'inopposabilité des exceptions, de sorte qu'il aura tout intérêt à faire jouer la faculté de substitution. Ces
convergences ne doivent cependant pas être un prétexte pour passer sous silence
les différences qui existent entre d'un côté les droits d'un créancier muni d'une
garantie autonome, et de l'autre ceux d'un créancier muni d'un cautionnement,
différences qui, par ailleurs, jouent en faveur de ce dernier.
La capacité du cautionnement à garantir des créances futures est l'une des
causes de son succès auprès des créanciers. Un tel cautionnement, dont la nature
a été découverte par Mouly, fait naître une obligation de couverture dont l'objet
est double : d'une part, déterminer l'étendue de l'intérêt cautionné qui trace « le
cadre de la garantie offerte par la caution », d'autre part, « couvrir le risque, l'aléa
du non-paiement »30. La caution est ainsi tenue des dettes nées pendant cette
période de couverture, elle assume une « obligation de règlement », y compris une
fois le terme de son engagement survenu. Or, cette distinction est inapplicable à la
garantie autonome puisque la survenance du terme extinctif met définitivement
fin aux obligations du garant autonome31 ; « l'indépendance par rapport au contrat
de base interdit (...) de mettre en œuvre la distinction entre obligation de couverture
29. En outre, cette action risque de se heurter à une difficulté pratique supplémentaire lorsque la
garantie est souscrite dans un contexte international : les tribunaux étrangers pourront être réticents à
condamner le bénéficiaire.
30. Ch. Mouly, Les causes d'extinction du cautionnement, préf. M. Cabrillac, Litec, coll. Bibl.
dr. entrep., t. 10, 1979, n° 260.
31. En ce sens V. Ph. Simler et Ph. Delebecque, op. cit., n° 320 ; Ch. Gavalda et J. Stoufflet,
« La lettre de garantie internationale », RTD com. 1980, p. 1 et s., n° 21 ; V. contra V. Mazeaud,
L'obligation de couverture, préf. P. Jourdain, IRJS Éditions, t. 27, 2010, n° 377 : « l'incidence de
l'autonomie peut être cantonnée à la seule opposabilité des exceptions, et l'on ne voit guère ce qui impose
de faire jouer, à l'inverse, l'autonomie de la garantie sur le plan de la durée. (...). L'introduction d'une
durée au sein (de) la convention va simplement être interprétée, non comme une période d'inscription du
risque, mais comme une période de mise en œuvre de la garantie : son écoulement emportera une libération

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