Droit et Économie - L'avenir de l'Union économique et monétaire : une perspective franco-allemande - 103

LA CONSTITUTION MONÉTAIRE DE L'UNION EN DÉBAT 103

comprendre le statut alors assigné à l'UEM. On doit d'abord relever que le
principe de création d'un quatrième pilier monétaire, qui aurait permis de
lui conférer davantage d'autonomie par rapport aux autres grands domaines d'action de l'Union européenne, avait été envisagé lors des négociations
du traité de Maastricht, mais n'a finalement pas été retenu. Cela n'est pas
anodin. Cela signifie que l'« ordre économique et monétaire »111 ne constitue pas un ensemble dérogatoire au droit de l'Union européenne, comme
l'a précisé la Cour de justice112 : l'UEM fait partie intégrante de l'Union
européenne. Pour reprendre les termes de Francesco Martucci, il constitue
« un sous-ordre ou sous-système de l'ordre juridique de l'Union. »113. Par
ailleurs, le traité de Maastricht fait, semble-t-il, assez clairement de l'UEM
une « action de la Communauté » (article 4), au service de missions socioéconomiques variées (article 2). L'action de la Communauté européenne
en matière économique et monétaire est dès lors largement finalisée.
Un statut plus ambigu depuis le traité de Lisbonne. Ce statut instrumental
de l'UEM comme moyen pour l'Union européenne de réaliser les diverses
missions qu'elle s'est fixées ressort moins nettement du traité de Lisbonne.
La question de savoir si l'UEM constitue une fin ou un moyen de l'Union
européenne peut être davantage débattue. D'un côté, le traité de Lisbonne
paraît désormais assigner à l'Union européenne l'objectif d'instauration de
l'UEM dont la monnaie est l'euro (article 3 § 4 TUE). Mais d'un autre côté,
l'instauration d'une politique économique (article 119 § 1 TFUE) de même
que la monnaie unique et la définition d'une politique monétaire (article 119 § 2 TFUE) restent bien décrites comme une « action » de l'Union.
L'article 119 § 1 précise encore que l'action des États membres et de
l'Union en matière de politique économique doit servir les finalités énoncées à l'article 3 TUE. Le renvoi à l'article 3 dans sa globalité (et non seulement l'article 3 § 3) inscrit l'action économique de l'UEM dans le cadre
général des différentes missions de l'Union qui y sont définies. Cela n'est
cependant pas rappelé au § 2 concernant le volet monétaire. Si l'UEM
demeure une action de l'Union, cette action est donc moins clairement
finalisée avec le traité de Lisbonne qu'avec le traité de Maastricht.
111. MARTUCCI F., L'ordre économique et monétaire de l'Union européenne, préc. Cet ordre est défini
comme « l'ensemble, structuré en sous-système, de tous les éléments entrant dans la constitution d'un droit régissant l'existence et le fonctionnement de la politique économique et
monétaire dans l'Union européenne » et plus précisément encore comme l'« ensemble des
règles d'objectif, d'encadrement et opérationnelles, dont l'agencement permet de limiter les
choix de politique économique et monétaire afin de promouvoir un bien commun macroéconomique ».
112. CJCE, 10 juill. 2003, Commission c/BCE, aff. C-11/00, Rec. 2003, p. 07147 : « quelles que soient
les particularités de son statut dans l'ordre juridique communautaire, la BCE a bien été instituée par le traité CE » (cons. 164).
113. MARTUCCI F., L'ordre économique et monétaire de l'Union européenne, préc., p. 84.
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