Hors collection - Les enjeux de la déjudiciarisation - 184

178 DRoItS DeS PaRtIeS et DeS tIeRS au MoDe DÉJuDICIaRISÉ

dans la justice étatique. Les parties cristallisent tout de même un différend,
ils véhiculent un mécontentement. trouver un point de concorde là où la
discorde règne prend nécessairement un délai plus ou moins important.
La simple volonté de recourir à une médiation ne devrait-elle pas imposer
de laisser le temps œuvrer ? Comme le rappelle une partie de la doctrine38,
lorsque la procédure de médiation est un préalable à l'action en justice,
il faudrait pouvoir l'inclure dans le temps total du traitement judiciaire
de l'affaire. La difficulté réside ici dans l'adéquation entre le temps juridictionnel et le temps passé hors de cette sphère. en tout état de cause,
la célérité peut susciter trois types de réflexion. D'abord, l'enfermement
de la mesure dans un délai pourrait forcer les parties à discuter. Il s'agit
peut-être d'une des idées qui a conduit à l'adoption de l'article 131-3 du
Code de procédure civile enfermant la médiation judiciaire dans un délai de
trois mois, renouvelable une fois à la demande du médiateur. Ce délai est,
cependant, court : la discussion peut échouer faute de temps, du moins si
l'affaire soumise à médiation est complexe. Il est encore plus court en droit
de la consommation où le règlement amiable ne peut durer que deux mois,
renouvelable une fois39. ensuite, la célérité peut manquer de pertinence
selon les procédures déjudiciarisées. Dans le cas de la conciliation où le
tiers est un bénévole, faut-il le contraindre temporellement ? La question
se discute. Le conciliateur de justice, pressé par le temps, peut être dans
l'impossibilité de proposer une solution pertinente aux parties. enfin, la
déjudiciarisation pourrait avoir pour effet de réduire le temps de jugement
en réglant partiellement - par le biais d'un accord partiel - le litige40. en
ceci, la célérité n'est peut-être pas pertinente puisque le temps passé à la
discussion se répercutera positivement sur le temps de jugement, réduit
proportionnellement. en somme, c'est la souplesse de la déjudiciarisation
qui est en jeu ici41.
Malgré ces exclusions nuancées, il faut noter que certains droits
issus du procès équitable demeurent et parfois se transforment en mode
déjudiciarisé.

38. S. Guinchard et alii, Droit processuel - Droits fondamentaux du procès, op. cit., p. 1347,
n° 596.
39. J. Julien, Droit de la consommation, Paris, LGDJ, Domat, 2015, p. 565, n° 431.
40. Contra : S. amarani Mekki, « La déjudiciarisation », Gaz. Pal., 5 juin 2008, n° 157,
p. 2 et s., not. n° 18 et s.
41. Par exemple pour la conciliation : J. Vallansan, « La conciliation : rapidité, souplesse
et confidentialité ? », LPA, 14 juin 2007, p. 9 et s.
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