Hors collection - Les enjeux de la déjudiciarisation - 33

eVaN RaSCHeL

27

38. En cas d'échec de la CRPC (soit que la personne refuse la proposition, soit que le juge refuse l'homologation), le procureur de la République
« saisit, sauf élément nouveau, le tribunal correctionnel selon l'une des
procédures prévues par l'article 388 ou requiert l'ouverture d'une information »57. autrement dit, aucune déjudiciarisation n'a alors lieu.
Finalement, la CRPC ne relève pas de la déjudiciarisation, même si elle
traduit un amoindrissement du rôle du juge. Cette difficulté se retrouve
encore s'agissant de la CJIP, mise en place par la loi Sapin 2 à la fin de
l'année 2016, mais avec une conclusion peut-être différente.
39. Illustration récente : la validation dans la CJIP58. Dans le cadre
de la convention judiciaire d'intérêt public (CJIP), « Lorsque la personne
morale mise en cause donne son accord à la proposition de convention, le
procureur de la République saisit par requête le président du tribunal de
grande instance aux fins de validation »59. en théorie, cette validation, loin
d'être formelle, donne au président du tribunal un rôle important.
Sur la forme, « Le président du tribunal procède à l'audition, en audience
publique, de la personne morale mise en cause et de la victime assistées, le
cas échéant, de leur avocat »60.
Sur le fond, et à l'issue de cette audition, « le président du tribunal prend
la décision de valider ou non la proposition de convention, en vérifiant le
bien-fondé du recours à cette procédure, la régularité de son déroulement,
la conformité du montant de l'amende aux limites prévues au 1° du I du
présent article et la proportionnalité des mesures prévues aux avantages
tirés des manquements »61.
40. Ce rôle important du juge interpelle : peut-on réellement parler de
déjudiciarisation ? Sa tâche n'est qu'à peine allégée. en outre, son office
pourra être entièrement mobilisé si la personne morale, après validation,
se rétracte (elle dispose d'un délai de dix jours pour le faire) ; de même
que la CJIP n'exclut nullement des poursuites à l'encontre des personnes
physiques : « Les représentants légaux de la personne morale mise en cause
demeurent responsables en tant que personnes physiques »62. en conséquence, la proposition de CJIP est, non seulement, sans effet à leur égard,
mais ne peut encore pas prévoir de clause atténuant ou dégageant la responsabilité des dirigeants sociaux. Pour autant, et comme l'article 41-1-2 du Code
de procédure pénale prend soin de le préciser, la décision d'homologation
57. CPP, art. 495-12.
58. Sous un autre angle, la CJIP est également présentée infra, n° 53.
59. CPP, art. 41-1-2, II, al. 1er.
60. CPP, art. 41-1-2, II, al. 2.
61. CPP, art. 41-1-2, II, al. 2.
62. CPP, art. 41-1-2, I, dernier alinéa.
Hors collection - Les enjeux de la déjudiciarisation

Table des matières de la publication Hors collection - Les enjeux de la déjudiciarisation
