Hors collection - Les transformations de la preuve pénale - 31

PReuVe eT VÉRITÉ(S)

inconnues lors des débats sont présentées, de nature à établir l'innocence
du condamné »35. Cette formulation fut reprise par le Code de procédure
pénale, puis élargie par la loi n° 89-431 du 23 juin 1989, qui réécrivit ainsi le
dernier alinéa de l'article 622 : « après une condamnation, vient à se produire
ou à se révéler un fait nouveau ou un élément inconnu de la juridiction
au jour du procès, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du
condamné ». on notera que depuis cette réforme il n'est plus nécessaire
d'établir l'innocence du condamné pour obtenir la révision, il suffit d'un
doute sur la culpabilité. La réforme de 2014 a proposé une formulation
mixte, tout en faisant disparaître les trois premiers cas d'ouverture à révision, lesquels sont englobés par la notion de fait nouveau, dans la mesure
où la jurisprudence a montré le caractère très extensible de cette notion :
un « fait » au sens de ce texte peut non seulement être une nouvelle preuve
ou l'invalidation d'une ancienne, mais aussi un attribut de la personnalité
(par exemple la nationalité française d'un prétendu étranger condamné
pour avoir violé un arrêté d'expulsion), une situation juridique ou une
découverte scientifique36. De ce point de vue, le fait nouveau est souvent
confondu en jurisprudence avec « l'élément » inconnu visé par le texte.
Quant à la nouveauté, elle est liée à l'état des connaissances, de sorte qu'un
fait qui était connu lors du jugement mais inexploitable faute, par exemple,
de connaissances scientifiques suffisantes, pourra être considéré, plusieurs
années plus tard, comme nouveau, si l'on peut désormais l'exploiter et qu'il
est de nature à faire naître un doute sur la culpabilité. C'est dire si la vérité
judiciaire est fragile.
elle l'est d'autant plus que la réforme de 2014 a facilité la mise en œuvre
de la procédure de révision, en mettant en place en effet une cour de révision et de réexamen et une commission d'instruction des demandes de
révision et en réexamen qui est habilitée à procéder directement ou par
commission rogatoire « à tout acte ou information utile à l'instruction
de la demande, à l'exception de l'audition de toute personne à l'égard de
laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis
ou tenté de commettre une infraction » (art. 624 CPP). Il est notable en
outre que la commission de révision ne joue plus le rôle d'un simple filtre
mais apprécie également le sérieux du doute sur la culpabilité37. enfin,
35. on rappellera que ce texte a notamment permis de sauver Dreyfus : le fait nouveau
étant alors la découverte du caractère faux du bordereau établissant la trahison, Cass. ch.
réunies, 3 juin 1899, cité par A. Bavitot, art. préc., p. 81.
36. Pour des illustrations jurisprudentielles, v. A. Bavitot, art. préc., p. 82 et s.
37. Cette même loi du 20 juin 2014 a prévu des procédures pour mieux lutter contre
les erreurs judiciaires, notamment la conservation des scellés auprès des domaines ou de
l'AGRASC et l'enregistrement sonore des débats devant les cours d'assises, lorsqu'une
partie ou le ministère public le demande.

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