Hors collection - Les transformations de la preuve pénale - 55

LÉGALITÉ eT PReuVe

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sur lui dans l'accomplissement de cette fonction. Le législateur doit en effet
tenir compte des normes à valeur supra-législative qui tendent à encadrer
son action et des interprétations qu'en livrent les organes chargés d'en
assurer le respect. Aussi bien peut-on parler d'humilité lorsqu'on constate
que le législateur modifie les règles applicables aux méthodes probatoires
pour se conformer à des exigences venues « d'en haut ».
1. Ces exigences, ce sont d'abord celles posées par la CeDH vis-à-vis
des États membres de la « grande » europe : la Cour attache une importance
première à l'exigence de prévisibilité des normes pénales, en particulier
lorsqu'il s'agit de donner aux individus mis en cause, aidés de leur avocat,
les moyens de comprendre les règles de preuve dans une procédure toujours
plus complexe10. Les exemples d'influence directe ou indirecte de la CeDH
ne manquent pas en matière de légalisation de méthodes probatoires. Que
l'on songe aux arrêts Huvig et Kruslin rendus le 24 avril 1990 concernant la
pratique des interceptions de correspondance11 : les condamnations prononcées contre la france dans ces affaires célèbres furent à l'origine d'une
réaction que l'on a pu qualifier d'« exemplaire »12 tant elle fut prompte13.
en 2004, c'est semble-t-il moins par crainte de s'exposer aux remontrances
de la Cour de Strasbourg que par volonté d'aligner notre législation sur
celle de certains pays européens que le législateur encadra les procédés de
sonorisation et de captation d'images dans certains lieux pour la découverte d'infractions relevant de la criminalité organisée14. L'initiative n'en
fut pas moins judicieuse puisque la CeDH, prenant le contre-pied de la
Cour de cassation, qui avait déjà admis le recours à la sonorisation d'un
parloir de maison d'arrêt15, condamna la france un an plus tard en raison

10. en ce sens, v. not. CeDH, Gr. Ch., 27 nov. 2008, Salduz c/Turquie, req. n° 36391/02,
§ 54. L'on pourrait ajouter cette mise en garde formulée par la Cour dans le domaine
sensible de la conservation des empreintes digitales et des données génétiques : « Tout État
qui revendique un rôle de pionnier dans l'évolution des nouvelles technologies porte la
responsabilité particulière de trouver le juste équilibre en la matière » (CeDH, Gr. Ch.,
4 déc. 2008, S. et Marper c/Royaume-Uni, req. n° 30562/04 et n° 30566/04, § 112).
11. CeDH, 24 avr. 1990, Huvig et Kruslin c/France, req. n° 11105/84 et 11801/85.
12. J.-P. Marguénaud, « La dérive de la procédure pénale française au regard des exigences
européennes », D. 2000, p. 249.
13. V. les art. 100 à 100-7 CPP créés par la loi n° 91-646 du 10 juill. 1991. La CeDH ne
manqua pas, d'ailleurs, de saluer l'intervention du législateur à l'occasion d'un arrêt Lambert
dans lequel elle condamnait toutefois la france en raison du refus de la Cour de cassation
de permettre à une personne victime d'écoutes téléphoniques, mais non titulaire de la ligne
surveillée, de bénéficier de la protection légalement instituée (CeDH, 24 août 1998, req.
n° 23618/94, spéc. § 28 et 38).
14. Art. 706-96 à 706-102 CPP créés par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004.
15. Cass. crim., 12 déc. 2000, n° 00-83852, Bull. crim., n° 362.
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