Bibliothèque de droit public - Tome 302 - Les interventions des tiers porteurs d'intérêts collectifs dans les contentieux constitutionnels incidents français et italien - 396

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LES INTERVENTIONS DES TIERS PORTEURS D'INTÉRÊTS COLLECTIFS
DANS LES CONTENTIEUX CONSTITUTIONNELS INCIDENTS FRANÇAIS ET ITALIEN

intervenir. Si l'article 6 du Règlement intérieur adopté par le Conseil constitutionnel mentionne un « intérêt spécial », dont le caractère doit ensuite être déterminé
par voie jurisprudentielle, le texte italien évoque tout simplement la possibilité d'intervenir, sans lui attacher de fondement42. Il serait ainsi opportun d'apporter une
modification à ces dispositions, en précisant la nature de l'intérêt demandé pour
que l'intervention soit recevable, en raison notamment de son lien avec la portée
concrète et subjective de la question ou avec sa portée générale.
1342. En l'absence de modification normative, il faudrait au moins que cette
condition soit précisée de manière claire et explicite dans les motivations des décisions, afin que la clarté et la constance de l'interprétation jurisprudentielle
puissent pallier l'incertitude résultant du caractère vague du texte. En effet, quand
bien même les juges constitutionnels décideraient de laisser entièrement la définition de l'intérêt à intervenir à la pratique jurisprudentielle, le pouvoir discrétionnaire qu'ils se sont ainsi réservé ne devrait pas être perçu comme délibérément
arbitraire. La clarté et la constance de la jurisprudence seraient alors le gage de
l'impartialité du juge dans la détermination de cet intérêt.
1343. Ensuite, en ce qui concerne spécifiquement les critères de recevabilité,
l'existence de l'intérêt à intervenir n'est pas forcément le seul à être pris en compte.
Aux conditions de forme, le juge constitutionnel peut en ajouter d'autres, notamment
pour les interventions qui ne relèvent pas de l'exigence de garantie des droits de la
défense et qui ne font donc pas l'objet d'un droit. La reconnaissance de ces critères est
dictée par les exigences d'efficacité et de célérité de la procédure. Elle doit alors être
laissée à la jurisprudence, afin que le juge constitutionnel puisse la moduler en fonction des contraintes concrètes présentées par les différentes questions.
1344. La reconnaissance de ces critères est, en effet, liée à l'exigence de sélection
des interventions qui peut se présenter de manière différente en fonction du contexte
de la procédure concernée, en raison de plusieurs facteurs. Le nombre d'interventions
présentées, par exemple, peut poser un problème d'encombrement. La qualité et la
teneur des observations peuvent, ensuite, poser des problèmes d'efficacité ou d'utilité,
en cas notamment d'observations redondantes ou sans rapport avec la question. La
qualité de l'intervenant peut également soulever la question de l'utilité ou de la légitimité de la prise en compte de ses observations, en raison de sa renommée et de sa
compétence. Les délais de procédure peuvent aussi dresser un obstacle supplémentaire à la recevabilité des interventions, en cas notamment de procédures urgentes.
1345. Ce catalogue des facteurs ayant un impact sur l'exigence de sélection
des interventions n'est pas exhaustif et la variété des questions contingentes liées
au traitement des interventions justifie la sauvegarde d'une large marge d'appréciation du juge constitutionnel. Cependant, cette marge d'appréciation ne doit
pas basculer dans l'arbitraire, qui affaiblirait la légitimité de l'œuvre du juge
constitutionnel. Pour éviter ce risque, il faut alors que les critères, adoptés au fur
et à mesure des différentes exigences révélées par les procédures en question,
soient présentés de manière explicite et claire dans la motivation des décisions.
1346. Dans l'évaluation de la recevabilité des interventions fondées sur les
droits de la défense, l'arbitraire n'a pas de place. Mais, même lorsque ces droits ne
42. Voir supra, par. 466 sqq. Sur la souplesse des N.I., dans leur rédaction initiale ainsi que dans
leurs modifications successives, voir E. Bindi, La garanzia della Costituzione. Chi custodisce il
custode ?, Giappichelli, Turin, 2010, p. 24-25.

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