Manuel - Droit de la bioéthique - 2e - 33

L'identification et le contenu des lois de bioéthique
de la personne peut donc être vue comme un élément de son appréhension
juridique. S'il semble absent du Code, le corps y est en réalité omniprésent
parce qu'il est envisagé au travers de la personne et que la protection
de celle-ci, suffit à assurer la protection de celui-là. On retrouve
d'ailleurs cette logique dans le Code pénal au sein duquel les dispositions
consacrées aux infractions corporelles sont envisagées au titre des crimes
et délits contre les personnes. Protéger la personne permet de protéger
son corps. C'est donc dans cet esprit que la jurisprudence eût à connaître
d'un corps confondu dans la catégorie de la personne : un corps-sujet.
2. Dans la jurisprudence médicale
24. Dispositions générales, interprétation créatrice. − La très
grande généralité de nombreuses dispositions du Code civil permit d'appréhender
les premières questions relevant de ce que l'on nomme aujourd'hui
le droit de la bioéthique. Ce Code, souvent raillé en raison d'un style
marqué de la France rurale des temps jadis, a ainsi pu surmonter
l'épreuve du temps et fonder, grâce à l'interprétation créatrice de la jurisprudence,
les réponses du droit aux premières questions médico-scientifiques.
Ainsi que l'écrivait Portalis, dans le Discours préliminaire sur le projet
de Code civil, « les lois, une fois rédigées, demeurent telles qu'elles ont
été écrites ; les hommes, au contraire, ne se reposent jamais ; ils agissent
toujours [...] Une foule de choses sont donc nécessairement abandonnées
àl'empire de l'usage, à la discussion des hommes instruits, à l'arbitrage
des juges. L'office de la loi est de fixer, par de grandes vues, les maximes
générales du droit ; d'établir des principes féconds en conséquence, et
non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur
chaque matière. C'est au magistrat et au jurisconsulte, pénétrés de l'esprit
général des lois, à en diriger l'application [...] C'est à l'expérience à combler
successivement les vides que nous laissons »3
. De grandes vues, et
l'expérience pour combler les vides laissés : c'est ce mécanisme unissant
la règle à son interprète qui a permis de tracer les contours de licéité des
premières recherches médicales.
ches médicales4
25. Existence ancienne des recherches médicales. − Les recherexistaient
avant que la loi ne s'y intéresse de manière
particulière. Dans son Cours de Code Napoléon, Demolombe les envisageait
déjà. Il affirmait ainsi que « le médecin doit toujours être guidé par
la pensée de soulager ou de sauver son malade, mais entreprendre sur lui
une expérience nouvelle et dangereuse par simple amour de l'art, par
3. J.-E.-M. PORTALIS, Discours préliminaire sur le projet de Code civil reprod. in, Discours et rapports sur le
Code civil, PUC, 1989.
4. Bibl. :S. GROMB, Le droit de l'expérimentation sur l'homme,Litec,1992 ; L. CIMAR, Lesaspectsjuridiquesde la
recherche biomédicale, th. dactyl. Grenoble II, 1997 ; B. BÉVIÈRE, La protection de la personne dans la recherche
biomédicale, th. Rennes I, 1996, Les Études Hospitalières, coll. « thèses », 2001 ; E. GENNET, Personnes vulnérables
et essais cliniques. Réflexions en droit européen,LEH éditions,coll. « thèses », vol. 28, 2020,préf.
E. Brosset ; A. FAGOT-LARGEAULT,« Éthique de l'investigation scientifique sur l'être humain », in Y.MICHAUD
(dir.), Université de tous les savoirs, vol. 1, Odile Jacob, 2000, p. 248-262.
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