Systèmes - Communications numériques - 1re - 105

Le juge, régulateur des communications numériques

2. Le juge constitutionnel et la régulation
Depuis la décision emblématique de 1982 reconnaissant la
liberté de communication dans le cadre d'un contrôle de
conformité19, le juge constitutionnel n'a eu de cesse d'accompagner
les autorités de régulation sans les distinguer des AAI. Autrement
dit, il a concouru à l'émancipation de l'administration sans pour
autant reconnaître la régulation. Le regard du juge constitutionnel
sur ce « phénomène administratif » est bienveillant, constitutionnalisant progressivement le droit des autorités de régulation, d'abord au
regard du droit de la communication20, puis au regard de l'exercice
des activités numériques21. Les communications numériques mobilisent de ce point de vue le Conseil constitutionnel. En effet, il a
reconnu la nature administrative de ces autorités22, a précisé qu'il
ne s'agissait pas d'autorités juridictionnelles23 en dépit de leur soustraction du pouvoir hiérarchique et de leurs prérogatives24. D'ailleurs, le Conseil n'a jamais caractérisé l'indépendance à l'égard du
pouvoir législatif ou du juge, bien au contraire, car les contrôles opérés sont nécessaires à l'organisation de la séparation des pouvoirs
et à la responsabilisation des autorités de régulation. Ainsi le législateur peut supprimer une autorité ou la remplacer au besoin dès
lors que les exigences constitutionnelles sont respectées25. Pour le
Conseil, le législateur peut également charger une AAI de « veiller
au respect des principes constitutionnels en matière de communication audiovisuelle »26, et tout particulièrement au pluralisme et à
l'honnêteté de l'information. Quant aux prérogatives de ces autorités
administratives, il les a toujours encadrées sans les restreindre
alors que le principe de l'octroi d'un pouvoir réglementaire et de
sanction n'allait pas de soi. Pour autant, il a admis cette « déconcentration fonctionnelle » par une interprétation utile de l'article 21 de la
Constitution27, reconnaissant un pouvoir réglementaire volontairement limité dans son champ d'application et son contenu28, et
19. Cons. const., 27 juill. 1982, nº 82-141 DC, Loi sur la communication audiovisuelle.
20. MONTALIVET (DE) P., « Constitution et autorités de régulation », RDP 2014, p. 316.
21. SHULGA-MORSKAYA T., « Le numérique saisi par le juge, l'exemple du conseil constitutionnel », RDP 2017, p. 93.
22. Cons. const., 18 sept. 1986, nº 86-217 DC, cons. nº 23.
23. Cons. const., 23 janv. 1987, nº 86-224 DC, cons. nº 22, s'agissant du Conseil de la concurrence.
24. Cons. const., 18 sept. 1986, nº 86-217 DC, cons. nº 96, à propos de la CNCL.
25. Ibid., cons. nº 4 et 5.
26. Cons. const., 17 janv. 1989, nº 88-248 DC, cons. nº 27.
27. MONTALIVET (DE) P., « Constitution et autorités de régulation », préc.
28. Cons. const., 17 janv. 1989, nº 88-248 DC, cons. nº 16 pour le CSA ; Cons. const., 1er juill.
2004, nº 2004-497 DC, cons. nº 6 et 8.

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