Systèmes - Communications numériques - 1re - 11

Introduction

est conçue comme une liberté conditionnée, parfois sous haute surveillance, légitimant par exemple l'instauration du monopole de la
radio-télévision en 1945 ou la création d'une poignée d'autorités
administratives indépendantes (AAI) dès 1978. Ainsi, c'est bien l'existence de risques liés à l'exercice d'activités de communication qui
était visée. C'est d'ailleurs pourquoi les activités de communication
étaient cloisonnées et d'une certaine façon, maîtrisées par les pouvoirs publics par un éclatement des régimes juridiques. La prévention des risques ne deviendra une préoccupation explicite qu'au
e
XXI siècle, signe d'une société qui privilégie l'ouverture et la transparence. Hier comme aujourd'hui, il n'existe pas un droit applicable
aux communications numériques mais des droits bien distincts. Les
régimes juridiques applicables aux différents supports de communication, construits en silos, sont adaptés à chacun des usages, et
comportent des principes directeurs qui gouvernent l'action et les
risques engendrés par les différents émetteurs de contenus. Ces
principes résultent de l'interprétation qu'il convient de donner, pour
chaque secteur, à l'article 11 de la Déclaration des droits de
l'homme ou plus récemment à l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce pluralisme juridique a été privilégié pour casser,
autant que faire se peut, la position dominante des acteurs privés
sur le marché11 permettant à l'exécutif d'empêcher la constitution
d'un contre-pouvoir12.
Cette obsession institutionnelle n'a pas permis au secteur des
communications de bénéficier d'un droit global, fondé sur des principes directeurs transversaux eux-mêmes inspirés par un objectif
commun bien réel : limiter les risques liés à l'exercice d'activités
complexes à mi-chemin entre la liberté d'expression et les libertés
économiques, comme à l'époque l'atteinte à l'anonymat des choix
des récepteurs, à la protection du droit d'auteur, au pluralisme
externe et interne, à l'honnêteté de l'information. Pour chaque cas
il aurait fallu identifier les risques, les analyser, les évaluer pour en
déterminer ou non l'acceptabilité, et ne faire prévaloir la liberté que
si ces risques sont acceptables. La prise en compte des risques
dans un environnement « anthropocentré » procède en effet d'un
besoin de sécurité, préoccupation majeure du XXIe siècle. Au lieu de
cela, le règne de l'inacceptable a été en pratique sacré dès la
11. CHEVALLIER J., « La régulation juridique en question », Droit et société 2001/3, nº 49, p. 841.
12. MÉZARD J., Un État dans l'État : canaliser la prolifération des autorités administratives indépendantes pour mieux les contrôler, rapport Sénat nº 126 (2015-2016).

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