Systèmes - Communications numériques - 1re - 38

Communications numériques

bien, aboutissant même parfois à l'autocensure des professionnels
craignant les foudres de l'ARPP !
La gestion des noms de domaines34 se caractérise « par un
curieux mélange d'autorégulation par des acteurs privés et d'emprise du gouvernement américain, de complexité institutionnelle et
d'absence globale d'encadrement centralisé, de technicité des problématiques et de multiplicité des enjeux, à la fois économiques,
sociétaux et politiques »35. Depuis la fin des années quatre-vingtdix, la coordination du système est assurée par une société de droit
californien, l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers
(ICANN), opérant sur le fondement d'un « memorandum of understanding » avec le ministère du Commerce des États-Unis et ce jusqu'au 1er octobre 2016. À cette date, le gouvernement américain a
libéré l'ICANN de sa tutelle. Les gouvernements ne sont représentés auprès de l'ICANN qu'au sein d'un comité consultatif, le Government Advisory Committe (GAC). Son statut est très contesté mais en
même temps respecté par les États européens faute de piste moins
dangereuse pour la gouvernance de l'Internet. Depuis 2016 cependant, ce sont les membres de l'organisation, c'est-à-dire des représentants des États, des entreprises et de la société civile originaires
du monde entier, qui prennent les décisions. Ces acteurs décideront
de l'avenir du net selon des règles de codécision censées prévenir
toute dérive. Ce modèle autorégulé, qui transfère une partie du pouvoir hors des États-Unis, a été préféré à d'autres, et notamment à la
piste onusienne, qui mettait l'Union internationale des télécommunications (UIT) en première position. Cependant, « les processus
internationaux, trop lourds, sont incapables de suivre la rapidité
des évolutions technologiques ; les règles générales, contenues
dans un traité international ne pourraient s'adapter à la diversité
des situations locales ; elles entraveraient les possibilités d'évolution du réseau et les services associés en les enfermant dans un
cadre dont toutes les conséquences ne pourraient être
anticipées »36. Dès lors, la domination de l'Internet Society
américaine37 sur des instances telles que l'UIT, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) ou plus globalement les
34. V. BELI L., De la gouvernance à la régulation de l'Internet, 2016, Berger Levrault ; GOLA R., La
régulation de l'Internet : noms de domaine et droit des marques, 2002, Le Manuscrit.
35. Conseil d'État, Le droit souple, préc., p. 91.
36. Ibid., p. 103.
37. Association de droit américain, fondée en 1992 par des personnes impliquées pour promouvoir des normes internationales de l'Internet de façon à garantir un Internet ouvert.
Cependant, aucun acteur français n'en fait partie.

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