Systèmes - Syndicalisme et droits syndicaux - 1re - 30

Syndicalisme et droits syndicaux

essentiellement à travers le syndicalisme qu'ils vont faire vivre leur engagement. Le communisme dominant à la CGT ne leur sied guère davantage,
mais l'anticommunisme virulent de la CGT-FO ne leur convient guère
mieux non plus. C'est alors dans la CFTC qu'ils vont concrétiser leur parcours militant. Mais évidemment ils vont s'efforcer de gauchir, voire de subvertir ou de noyauter la CFTC. On ne s'étonnera pas de rencontrer dans
cette cohorte bien peu d'ouvriers et d'employés, mais d'abord des intellectuels médians. C'est à travers les cahiers Reconstruction que Paul Vignaux
(1904-1987) et ses amis vont faire de l'entrisme dans la CFTC. Ils ne cachent
pas une option préférentielle pour le socialisme au détriment de la référence chrétienne, surtout quand elle est entendue en référence stricte et
orthodoxe avec le compendium de la Doctrine sociale de l'Église (DSE),
c'est-à-dire l'ensemble des encycliques et des textes de Rerum Novarum,
1891, jusqu'à l'époque de Popularum Progressio du pape Paul VI (18971978). Paul Vignaux est le secrétaire général du Syndicat général de l'éducation nationale (SGEN). Que la future scission de 1964 fût animée par des
intellectuels n'est évidemment pas sans conséquence. Quand elle fut
consommée et qu'Eugène Descamps (1922-1990), personnalité en vue de
la CFTC, devint le premier secrétaire général de la CFDT, la préoccupation
majeure des scissionnistes consista à se laver du péché originel de ne pas
être né syndicat ouvrier. Outre la frénésie de débats sur des points byzantins, figure caractéristique des intellectuels médians, toute l'histoire de la
première période de la CFDT de 1964 jusqu'au rapport Moreau et le tournant
du recentrage de 1979 est marquée par une volonté d'apparaître comme la
pointe progressiste du syndicalisme français. Outre l'adoption de l'autogestion « à la yougoslave » du maréchal Tito (1892-1980) se voulant voie intermédiaire entre un capitalisme et une planification impérative également
rejetés, une sorte de militantisme extrême, échevelé et jusqu'au boutiste
marqua l'action de la CFDT première manière. La recherche de l'unité d'action avec la CGT devint le passage obligé que voulait emprunter la CFDT
naissante. Mais encore les évènements de 1968 marquèrent une césure, à
court terme invisible, mais réelle entre la CFDT et la CGT. La CFDT vécut
avec enthousiasme mai-juin 1968 pendant que la CGT et sa maison mère,
sur des instructions plus hautes, freinaient des quatre fers. Mais une différence essentielle restait malgré tout entre les responsables de la CGT et
ceux de la CFDT. Il n'est pas déraisonnable de dire que beaucoup parmi
les premiers étaient des idéologues ; quelques-uns parmi les seconds
étaient mus par le principe de réalité. C'est après la défaite de la gauche
aux législatives de 1978 dites du « programme commun » que la CFDT va
tirer un certain nombre de conclusions amenant la centrale à commencer
dans la terminologie officielle à pratiquer le recentrage. De façon encore
plus essentielle, beaucoup de militants avaient lu et découvert dans les
années précédentes ce qui se passait au pays du « socialisme réel ».
Quelque dix ans plus tard, la CGT-FO, se trouva fort dépourvue quand le
mur de Berlin s'effondra. La CGT-FO était adossée entièrement à une stratégie en contention, celle de l'anti-communisme. Que faire lorsque, du

Systèmes - Syndicalisme et droits syndicaux - 1re

Table des matières de la publication Systèmes - Syndicalisme et droits syndicaux - 1re